Asile d’aliénés, Mount Hope
18 sept. 1873
Monsieur le révérend, -- Je prends la liberté de vous écrire puisque je comprends que vous demandiez des renseignements hier soir au sujet des blessure faites à Abraham Landre que vous visitiez là-bas, et que je suis en position de vous fournir quelques renseignements. M. Landre, paraît-il, avait l’habitude d’aider à la cuisine de ce pavillon et en mars dernier, une altercation a éclaté avec un certain Dyke, un gardien, qui lui a cruellement donné des coups de pied et lui a marché dessus, lui infligeant des blessures auxquelles le pauvre homme est maintenant en train de succomber. Dyke, dont le nom de baptême est Edwin, (mais je n’en suis pas certain puisque certains disent que ce serait Isaac,) a par la suite été congédié, mais pas à cause de cette affaire, puisque les autres patients étaient à l’époque trop intimidés pour témoigner, bien qu’une enquête ait été menée. Moi-même, je n’étais pas présent à ce moment-là, mais deux patients en convalescence, Charles Thomson et Benjamin King, qui sont encore dans ce pavillon, ont été témoins de l’agression et peuvent vous en raconter les détails, si vous le leur demandez. Je crois comprendre qu’Edwin Dyke est un soldat retourné à la vie civile qui réside à Halifax. Le dénommé Wm. McDonald, que vous avez vu sur son lit de mort à quelques reprises depuis, était dans ce pavillon; la mort l’a frappé alors qu’il était assis à la table à dîner, on l’a ensuite transféré dans un autre pavillon et il est mort dans la nuit. C’était un homme silencieux, il ne faisait pas d’exercice et dépérissait. Je n’ai jamais vu le directeur lui parler ni prendre son pouls lors de ses rares visites dans le pavillon, bien que la santé de l’homme déclinait très rapidement.
J’ai confiance, Monsieur le révérend, que vous ne me trouverez pas trop empressé à vous mettre au courant de ces faits, mais j’ai moi-même souffert si cruellement de l’usage de la brutalité dans cet endroit que j’espère, si cela est possible, sauver d’autres pauvres êtres d’un traitement similaire. J’ai été amené ici le 7 juin et le jour suivant, un dimanche, j’ai été brutalement roué de coups de pieds et battu; cet acte de violence à mon endroit a été divulgué et trois gardiens, Wm. Neil, et Alex. McCoy ont conséquemment été congédiés; mais je ne crois pas pouvoir un jour guérir complètement des blessures qui m’ont été infligées ce jour-là. J’ai été bien traité depuis. Je n’ai pas d’animosité envers le directeur personnellement, le Dr DeWolf, que j’ai toujours trouvé courtois; mais je n’hésite pas à déclarer qu’il néglige terriblement son devoir de supervision personnelle et d’investigation dans les dossiers des individus car autrement, des évènements tels que ceux que j’ai mentionnés n’auraient jamais pu se produire. Plusieurs cas similaires de mauvais traitements, bien que pas aussi graves, se sont produits sous mes propres yeux. Le secret dont tout est entouré est également une très mauvaise caractéristique de la gestion ici; les amis des patients ont rarement le droit de les visiter, et les visiteurs sont admis dans les pavillons où tout paraît à l’ordre, alors que les autres puent la saleté et la misère. Je suis dans ce pavillon, où se trouvent environ 30 patients, depuis trois mois et demi et vous, Monsieur le révérend, êtes le seul homme d’Église à y être entré pendant cette période.
Vous êtes libre d’utiliser cette lettre comme vous jugerez bon de le faire.
Veuillez agréer, Monsieur le révérend, l’expression de mes sentiments respectueux,
Peter McNab.
M. le révérend Woods, etc., etc.