Aurore — Le mystère de l'enfant martyre
   
 
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GEORGES GAGNON, agé de 9 ans

EXAMINE PAR ME A. LACHANCE C. R. DE LA PART DE LA COURONNE:

Q. Où restais-tu l'été dernier?

R. Chez nous.

Q. Chez qui? Chez vous, qu'est-ce qu'il y avait dans la maison, qui restait avec vous autres, là chez vous?

R. Il y avait maman, Aurore et Marie-Jeanne.

Q. Ta mère, Aurore et Marie-Jeanne?

R. Et Gérard.

Q. Et puis, est-ce que ton père restait là aussi, dans ce temps là, restait-il dans la maison?

R. Non, il tait au bois.

Q. Quand est-ce qu'il revenait à la maison comme ça?

R. Il revenaitrien que le soir.

Q. Maintenant, dis si tu as vu comment ton père traitait Aurore dep is l'été dernier?

R. Oui.

Q. Qu'est-ce que t'as vu à Aurore?

R. L'été passé?

Q. Oui?

R. L'été passé, on avait un fouet, c'était pour les boeufs et puis, il montait en haut, il l'a battue avec ça.

Q. Comment, est-ce que tu l'as vu monter en haut?

R. Oui.

Q. Tu l'as vu?

R. ....

Q. Comment savais tu qu'il l'a battait en haut, tu n'étais pas allé là?

R. Non, je le voyais, je l'ai vu monter, pas bien souvent.

Q. Combien de fois l'as tu vu monter en haut?

R. Je l'ai vu monter rien que quatre fois.

Q. Maintenant, qu'est-ce qui s'est passé en haut? Entendais tu ce qui se passait en haut?

R. Oui.

Q. Où étais tu, toi, pendant qu'il était en haut, où étais tu toi?

R. Moi, j'étais en bas.

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Q. Qu'est-ce que c'est que tu entendais en bas ainsi?

R. J'entendais brailler Aurore.

Q. Disait-elle quelque chose Aurore?

R. Oui.

Q. Qu'est-ce qu'elle disait?

R. Elle criait: Aie.

Q. A part ça, as tu vu si ton père l'a battue d'autres fois que ces quatre fois là avec le fouet à boeufs. As tu vu s'il l'a maltraitée autrement qu'avec le fouet à boeuf?

R. Non, rien qu'une fois cet hiver. Maman a dit, lui a dit, à cause..... Il l'a battue rien qu'une fois.

Q. Avec quoi ?

R. Avec une hart, c'est tout.

Q. Et pu s, à propos de quoi qu'il l'a battait comme ça -- c'était, ça, avec une hart?

R. Parce que maman lui a conté des mentries.

Q. Quelle mentrie a-t-elle dites ta mère. Dis ça qu'est-ce que ta mère lui a dit?

R. Elle a dit à papa qu'Aurore était couchée dans la grange sur la paille, abrillée avec la paillasse et c'était pas vrai, c'était pas vrai, elle était après la remplir.

Q. A quelle place ça, à quelle place ça qu'il l'a battue comme ça avec une hart?

R. Dans la grange.

Q. Dans la grange?

R. II lui a donné rien que trois ( 3 ) coups d'hart.

Q. Sur quelle place, sur quelle partie du corps qu'il a donné ces trois coups de hart là?

R. Dans le dos.

Q. Maintenant, pour l'été dernier là, rappelle toi bien, tu as dit à la Cour tout à l'heure que tu l'avais vu battre quatre fois avec un fouet à boeufs et je te demande maintenant si tu l'as vu battre avec d'autre chose, l'été dernier?

R. Oui, avec le manche de hache, rien qu'une fois.

Q. C'était pourquoi qui l'a battue avec le manche de hache?

R. Je sais pas.

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Q. Maintena t, cet hiver, a part de la fois qu'il l'a battue avec une hart dans la grange, te rappeles tu autre chose?

R. Oui

Q. Qu'est-ce que c'est que tu te rappelles?

R. Une fois, une fois, maman.....maman l'a culbutée en bas de l'escalier.

Q. Mais te rappelles tu autre chose que ton père...

Objecté à la question comme non pertinente.

R. Je me rappelle pas.

Q. Je vais te poser la question de nouveau. A part la fois que tu l'as vu battre avec une hart, cet hiver, as tu vu autre chose, par ton père, au sujet d'Aurore?

R. Non, il a fait rien, à part de ça.

Q. Te rappelles tu de la mortd'Aurore?

R. Oui.

Q. Te rappelles tu si elle avait des blessures particulières vers le temps qu'elle est morte, Aurore?

R. Oui, elle en avait sur les genoux et partout sur les pieds.

Q. Te rappeles tu si elle avait ces blessures là, depuis combien de temps elle avait ces blessures là?

R. Oui, quasiment depuis l'été passé.

Q. As tu remarqué d'autre chose vers le temps d sa mort, a part les genoux et les pieds?

R. Non.

Q. As tu remarqué quelque chose à la figure?

Objecté à cette question, de la part de la défense.

Q. As tu compris la question?

r. Oui.

Q. As tu remarqué quelque chose sur la figure, sur son front?

R. Oui,elle avait une plaque noire sur le front comme ça.

Par la Cour

Q. Depuis combien de temps avait-elle cette plaque noire là?

PAR ME LACHANCE C. R. DE LA PART DE L'COURONNE

Q. Comment ça faisait-il de temps qu'elle avait ça?

R. Je peux pas dire combien de temps.

PAR LA COUR: A peu près?

R. Je peux pas dire comment ça fait de temps.

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Q. A peu près?

R. A peu près....trois ( 3 ) ans.

Q. A peu près tr is ans?

R. A peu près.

PAR ME LACHANCE C. R. DE LA PART DE LA COURONNE:

Q. Comment est-ce longtemps? Sais tu combien il y a de mois dans un an?

R. Non.

PAR LA COUR: Combien y avait-il de jours ou de semaines

R. Il y avait quatre ( 4 ) jours.

PAR ME LACHANCE C. R. DE LA PART DE L COURON E:

Q. Maintenant, es tu capable de dire la dernière fois combien de jours ou de semaines que ton père l'aurait battue, avant qu'elle meurt?

R. Cinq ( 5 ) jours avant qu'elle meurt.

Q. Es tu capable me dire avec quoi il l'aurait battue comme ça cinq jours avant?

R. Avec la hart.

TRANSQUESTIONNE PAR ME FRANCOEUR C. R. DE LA PART DE L'ACCUSE:

Q. Tu as dit que l'été dernier, ton père avait battu Aurore avec le fouet, en haut?

R. Oui.

Q. Quatre fois. Est-ce que c'est avant qu'Aurore ait été à l'hopital, ça?

R. Oui.

Q. Dans le temps des foins, ça?

R. Oui.

Q. Pourquoi l'avait-il battue comme ça?

R. Je me rappelle plus pourquoi.

Q. Tu ne rappelles pas pourquoi?

R . ....

Q. N'est-il pas vrai que c'est parce que ta maman avait dit à ton père de la battre?

R. Non, c'est pas pour ça.

Q. Pourquoi, alors?

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R. Je me rappelle plus pourquoi.

Q. Est-ce qu'il l'avait battue pour rien ou bienpour quelque chose qu'elle avait fait?

R. C'est pour rien.

Q. Comment?

R. Maman a dit une chose qui n'était pas vraie.

Q. Parce que ta mère avait dit une chose et ce n' tait pas vrai?

R. ....

Q. Ta mère disait qu'elle était voleuse?

R. Ou , et puis, elle a mis de l'argent dans son tour de cou, à Aurore et puis elle a dit que c'était Aurore qui avait volé ça.

Q. Et c'est pour ça que ton pè e l'avait battue?

R. Oui.

Q. Il croyait, ton père, qu'elle était voleuse?

R. Oui.

Q. Et c'est ta maman qui avait arrangé ça pour la faire passer pour voleuse?

R. Oui.

Q. L'as tu dit à ton pèreque c'était ta mère qui avait fait ça?

R. Non, maman a dit qu'elle allait nous faire pareille si on le disait.

Q. Ta mère a dit qu'elle allait vous faire pareille, si vous le disiez?

R. ....

Q. Est-ce qu'elle disait qu'elle avait volé à l'église aussi?

R. Oui.

Q. Ta mère disait ça?

R. Oui.

Q. Est-ce que c'était vrai ça, qu'elle avait volé à l'église?

R. Je sais pas. Maman avait mis d'autre butin dans l'armoire, et el e avait mis ça après pour mettre...

Q. Parle plus fort?

R. Maman a pris une affaire après la sainte table..

q. Un crochet?

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R. Oui, pour tenir la nappe -- je sais pas où elle l'a pris,-- et puis elle a mis ça dans le tablier àAurore.

Q. Et puis c'était elle qui l'a entré dans le tablier?

R. Oui, sur notre lit, et ça a tombé à terre, elle a été le montrer à Aurore.

Q. Elle a dit que c'était Aurore qui l'avait volé?

R. Oui.

Q. As tu dit à ton père que c'est ta mère qui avait fait ça?

R. Oui.

Q. Est-ce qu'il le savait ton père?

R. Elle voulait pas qu'on le dise.

Q. Est-ce que ta mère a fait autre chose pour faire battre Aurore par ton père?

R. Oui.

Q. Qu'est-ce qu'elle a dit?

R. Elle mettait des cochoneries à terre, contre le poele, elle disait que c'était Aurore.

Q. Est-ce qu'elle en a mis, alors, des cochoneries?

R. Oui.

Q. Où?

R. En haut, partout, bien il disait que c'était Aurore.

Q. Est-ce qu'elle en a mis ailleurs aussi?

R. Non.

Q. As tu eu connaissance qu'elle en ait mis dans les habits de ton père?

R. Oui, et puis, dans son "coat" pour l'été, et puis elle disait que c'était Aurore.

Q. Quand elle est revenue de l'Hotel Dieu, Aurore, elle était bien?

R. Oui.

Q. Pourquoi était-elle allée à l'Hotel Dieu?

R. Je pense que maman l'a blessée. Elle a dit que c'était le petit Bedard et les petits gars, chez mon oncle Alfred.

Q. Et c'est ta maman qui l'avait battue cette fois là?

R. Oui, elle a pris le tisonnier, elle lui e a donné un coup sur le pied, après ça, elle l'a brulée; le lendemain, c'était

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abouti.

Q. Le lend main, c'était abouti et c'est pour ça qu'elle a fait venir le docteur Lafond et ensuite, elle a été envoyé à l'Hotel Dieu?

R. Oui.

Q. Elle disait que c'étaient les petits Bedard qui lui avait fait ça?

R. Oui.

Q. C'est ce qu'elle a dit à ton père aussi?

R. Oui, et puis,elle essayait à les faire prendre...

Q. As tudit à ton père que c'était ta mère qui avait fait ça?

R. Non, elle voulait pas qu'on le dise.

Q. Quand elle est revenue de l'Hotel Dieu, Aurore, est-ce qu'elle tait mieux?

R. Oui.

Q. Elle était guérie?

R. ....

Q. La hart avec laquelle ton père a battu Aurore dans la grange, cet hiver, était-ce une grosse hart?

R. Non.

Q. Une petite hart?

R. Oui.

Q. Il l'a battue dans le dos?

R. Oui.

Q. Par dessus sa robe?

R. Oui.

Q. Est-ce qu'elle avait quelque chose sur elle, à part de sa robe?

R. Non.

Q. As tu eu connaissance que Marie Jeanne ait soigné Aurore? qu'elle lui a mis des onguents?

R. Oui.

Q. Quand?

R. L'été passé et cet hiver.

Q. Qui c'est qui avait dit à Marie Jeanne de la soigner comme ça?

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R. Personne.

Q. Personne?

R. ...

Q. C'est pas ton père qui avait dit de la soigner?

R. Je me rappelle plus.

Q. Tu te rappelles pas?

R. ...

Q. C'est des onguents qu'elle mettait sur ses blessures?

R. Oui.

Q. Tu as parlé que ton père avait corrigé Aurore avec un fouet à boeufs. Le fouet là, vous l'avez perdu l'été dernier?

R. Oui, et après, le lendemain, quand il a parti pour aller au foin, il a perdu son fouet.

Q. Il l'a perdu?

R. ....

Q. Tu dis qu'il l'a battue aussi avec un manche de hache quand ça? c'était l'été dernier ça?

R. Oui, l'été passé.

Q. Il l'a battue par dessus sa robe?

R. Oui, dans le dos.

Q. C'est avant qu'elle aille à l hopital ça?

R. Non, après.

Q. Tu dis que c'est l'été dernier?

R. Oui.

Q. C'est pas l'été dernier, quand elle est allée à l'Hopital, c'est dans le mois de septembre ou octobre, c'est avant qu'elle parte pour l'hopital, ça?

R. Oui.

PAR LA COUR: Est-ce que c'est avant ou après l'hopital

R. Avant.

PAR ME FRANCOEUR C. R. DE LA PART DE L'ACCUSE:

Ton papa, ici, était bon pour toi?

R. Oui.

Q. Il av it bien soin de toi?

R. Oui. Il a fait rien à part de la battre avec le fouet à boeuf et la hart.

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Q. Il ne l aurait pas battue comme ça si ta maman avait pas conté de mentries sur le compte d'Aurore?

R. Non, il l'aurait pas battue.

Et le témoin ne dit rien de plus.

MJ Tremblay
Sténographe

Je, soussigné, sténographe assermenté, certifie que ce qui précède est la reproduction fidèle de mes notes sténographiques; le tout conformément à la loi.

Et j'ai signé.

MJ Tremblay
Sténographe officiel.

Source: ANQ, TP 9, S1, SS1, SSS999, 1960-01-35769, 3B 023 03-05-002A-01, Cour du banc du roi, assises criminelles, district de Québec, Déposition de Georges Gagnon, procès de Télesphore Gagnon pour meurtre, n.d., 9.

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