La lumière sur l’affaire « Jérôme »
Le juge Savery déclare que le pensionnaire sans nom d’une maison de Digby est probablement italien.
Aucune enquête n’a jamais été menée.
Le bateau duquel Jérôme a été débarqué était Il Colombo—Plus de renseignements sont fournis.
Au rédacteur en chef du Herald.
Monsieur, —Dans les articles de votre journal le St. John Gazette concernant le malheureux nommé en tête de cet article, il y a une remarquable et importante omission. Permettez-moi de vous la fournir en précisant qu’il a mentionné que le bateau duquel on l’a débarqué était le Il Colombo. Lorsqu’on lui demandait son propre nom, il répondait « Jérôme ». Lorsqu’on lui demandait le nom du bateau, il répondait Il Colombo. J’en ai donc déduit qu’il était Italien, et qu’il était un marin ou un passager d’un bateau italien au moment où on lui a infligé cette atrocité inhumaine; il m’a également semblé qu’il aurait été facile de retrouver ce bateau et de résoudre ce mystère si les autorités provinciales avaient suivi cet indice. Mais apparemment, ils ne portaient absolument aucun intérêt à l’affaire, sinon que pour subvenir à ses besoins. J’étais déménagé de St. John pour établir ma résidence et ma pratique juridique à Digby en 1862, et j’ai vécu à cet endroit environ deux ans avant d’entendre parler du pauvre Jérôme. Je suis allé lui rendre visite et l’ai trouvé en pension dans une famille catholique respectable – digne des Français qui subviennent toujours aux besoins de leurs pauvres. La femme de la maison m’a appris les faits les concernant, lui et son bateau, mais lorsqu’il s’est aperçu qu’on parlait de lui et qu’on mentionnait son nom, il a froncé les sourcils en signe de désapprobation et a quitté le matelas posé sur le plancher sur lequel il se trouvait et est sorti en rampant avec ses mains, traînant ses moignons derrière lui. Les archives de la Chambre d’assemblée révéleront probablement la date exacte où il a été retrouvé, quelque part vers 1860. Pendant plusieurs années après cette date, il a vécu à Meteghan chez un certain Jean-Nicolas qui, m’a-t-on dit, avait fait partie du contingent sarde lors de la guerre de Crimée, mais qui parlait très mal français et anglais et qui ne parlait peut-être pas vraiment mieux italien. On m’a raconté il y a quelques années que Nicolas avait l’habitude de converser avec Jérôme, mais peut-être que la seule vérité dans cette information est que Nicolas, en s’adressant à lui en italien, a réussi à obtenir son nom et celui du bateau.
Il y a environ dix ou douze ans, mon intérêt pour cet homme et son histoire a été ravivé et j’ai pensé écrire au secrétaire d’État italien pour lui recommander de publier cette affaire dans les journaux italiens, mais j’ai probablement négligé de le faire.
A.W. Savary.
Annapolis, Royal, 16 novembre.