Le mystère de l’homme de Meteghan est enfin élucidé par le sénateur King.
L’histoire de l’étranger retrouvé sur la côte de la Nouvelle-Écosse n’est pas attribuable au Nouveau-Brunswick – on l’a au départ ramassé près de Chipman alors qu’il avait les deux jambes gelées.
L’étrange histoire de l’homme abandonné que les habitants de Sandy Cove, en Nouvelle-Écosse, ont retrouvé sur le rivage à proximité de ce village il y a près d’un demi-siècle, qui a été reproduite dans le Sun, un journal de Boston, a suscité beaucoup d’intérêt.
Il semble dommage d’enlever son caractère romanesque à une histoire aussi palpitante, mais la vérité est que cet homme n’a pas été laissé sur le rivage par une canonnière et n’a pas perdu ses jambes lors d’un conflit militaire. Voici l’explication à l’histoire de l’étranger de Meteghan :
Le sénateur King de Chipman dit que cet homme a été retrouvé dans les bois à environ 25 milles de Chipman il y a de cela quarante-cinq ans. Il était étendu sur une pile de billots, à demi mort de froid. Comment il s’est rendu jusque-là et qui il était demeurent un mystère. Quoi qu’il en soit, l’homme a été transporté jusqu’à Chipman où on a pris soin de lui. Ses jambes étaient tellement gelées qu’on a jugé nécessaire de les amputer afin de sauver la vie de l’homme. L’opération a été faite par feu le docteur Peters de Gagetown, un chirurgien très doué.
L’homme était de toute évidence étranger, déclare le sénateur, mais sa nationalité n’a pas pu être déterminée puisque le seul mot qu’on lui ait entendu prononcer était « Gamby »; c’est du moins comme tel qu’on l’a interprété.
C’est par ce nom qu’on connaissait et qu’on appelait l’homme le temps de son séjour à Chipman. Il semblait avoir perdu l’usage de ses facultés.
Ce sont les surveillants des pauvres qui prenaient soin de l’homme alors qu’il était à Chipman, mais soit ils se sont lassés de ce travail, soit la ville a éprouvé des difficultés financières et il a été décidé d’envoyer l’homme ailleurs. On l’a amené à Saint John par bateau à vapeur.
Le sénateur King dit ne pas être certain si c’est à la demande insistante des autorités de Saint John ou de celle des habitants de Chipman que l’homme a été expatrié de la province, mais il se souvient qu’on a mis l’étranger à bord d’une goélette côtière et qu’on l’a amené en Nouvelle-Écosse, où on l’a cruellement abandonné, pauvre misérable sans jambes, incapable de parler de façon cohérente.
À cette époque, la communication entre les provinces était limitée et les journaux ne faisaient pas tellement preuve d’initiative; par conséquent, il ne semble pas si étonnant que les Néo-Écossais n’aient pas entendu parler des gestes inhospitaliers de leurs voisins du Nouveau-Brunswick. L’état critique de l’homme et le mystère entourant son arrivée ont attiré la sympathie et l’intérêt des bons villageois et il est plutôt déplorable d’affaiblir même un peu l’aura sentimentale qui entoure leur tradition favorite.