Aurore — Le mystère de l'enfant martyre
   
 
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MARGUERITE LEBOEUF, âgée de quinze ans, de la paroisse de St-Jean Deschaillons,----------------

onzième ------------- mars, ---------

vingt, ---------

l' e Marie Anne Houde, épouse de Télesphore Gagnon:-

Interrogèe par Mtre.Arthur Fitzpatrick, Substitut du Procureur Général:-

Q. Connaissez-vous l'accusée ici présente, madame Gagnon?

R. Oui monsieur.

Q. Etes-vous déjà allée chez elle?

R. Oui monsieur.

Q. Quand ?

R. Dans la dernière semaine d'août.

Q. Connaissiez-vous la petite Aurore Gagnon qui est morte?

R. Oui monsieur.

Q. Maintenant, comment l'accusée traitait-elle la petite Aurore, quand vous étiez à la maison?

R. Elle l'a battue le temps que j'étais là.

Q. Avec quoi est-ce qu'elle la battait?

Objecté à cette preuve.

Preuve permise.

R. La première fois, elle l'a battue avec un éclat.

Q. Quelle était la grosseur de cet éclat?

R. Environ un pied de long et trois quarts de pouce d'épaisseur.

Q. Où la battait-elle, comme ça?

R. Sur les fesses, partout.

Q. Est-ce qu'elle battait fort?

R. Oui monsieur, fort.

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Q. Maintenant, comment se tenait l'enfant quand elle la battait comme ça?

R. Elle était debout.

Q. Maintenant, l'avez-vous vue battre à part de ça?

R. Oui monsieur, trois foir à part de celle-là.

Q. Les autres fois, avec quoi l'a-t-elle battue?

R. Une fois avec une hart, et ensuite avec un rondin de cèdre d'à peu près quatorze pouces de long.

Q. Est-ce qu'elle battait fort?

R. Oui monsieur, elle la battait sur les genoux; elle lui a donné deux coups, et j'ai parti, là, parce que j'avais peur d'elle.

Q. Y avait-il quelque chose sur le bout de ce rondin-là?

R. Oui monsieur: elle faisait sesripes pour allumer son poêle, et il y avait un noeud, et elle arrêtait tout le temps au noeud, et ça faisait un rond, et lui fessait sur les genoux avec ça; elle lui en a donné deux coups, et après ça, j'ai parti.

Q. Est-ce que la petite fille criait?

R. Oui monsieur, elle braillait.

Q. Est-ce qu'elle arrêtait quand la petite fille criait?

R. Non, elle disait: "Plus tu vas brailler, plus je vas t'en donner".

Q. Maintenant, sais-tu où elle couchait, cette petite fille-là?

R. Oui monsieur.

Q. Où couchait-elle?

R. En haut.

Q. Etait-elle bien logée? Est-ce qu'elle était bien couchée?

R. Elle était couchée sur un petit lit, elle devait avoir sa longueur: il y avait pas de paillasse,rien. Il y avait un oreiller, et pas de couvertures.

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Q. Maintenant, l'avez-vous vue battre à part de ça?

R. Oui monsieur.

Q. Quand?

R. En lavant sa vaisselle.

Q. Pourquoi la battait-elle?

R. Elle dit: "Regarde, Marguerite, elle lave bien ça, la vaisselle, quand je lui donne des coups"; elle dit: "Je te dis que je vas lui faire laver, la vaiselle, moi".

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Transquestionnée par Mtre.Louis Larue, de la part de l'accusée:-

Q. La connaissiez-vous, la petite Aurore?

R. Je l'avais pas vue avant cette fois-là.

Q. Vous ne l'aviez jamais vue avant?

R. Je l'ai vue une fois; elle restait chez mon oncle Octave Lord.

Q. Elle était malcommode?

R. Non monsieur, tranquille.

Q. Vous l'avez vue seulement une fois, vous?

R. Oui monsieur.

Q. Qu'est-ce que vous alliez faire, chez M. Gagnon, vous?

R. J'allais là pour me promener, et ensuite pour voir un peu ce qui se passait.

Q. Vous alliez voir ce qui se passait?

R. Pas rien que pour ça, pour me promener aussi.

Q.Surtout pour voir ce qui se passait?

R. Non, pour me promener.

Q. Qui vous avait envoyée voir ce qui se passait?

R.Maman et papa m'ont dit:"Tu vas y aller, et puis tu verras si c'est le cas ou si c'est pas le cas"; nous autres, on entendait dire ça par le monde.

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Q. Et c'est pour ça que vous y étiez allée?

R. Oui monsieur.

Q. Afin que s'il se passait quelque chose, de pouvoir rendre témoignage contre Madame Gagnon?

R. Ah non, je m'attendais pas à ça.

Q. Combien de fois en tout et partout êtes-vous allée chez M.Gagnon?

R. J'y ai été rien que cette fois-là.

Q. Alors, vous êtes allée seulement qu'une fois chez Madame Gagnon?

R. Quand ils se sont mariés la deuxième fois, j'y ai été rien qu'une fois, chez mon oncle.

Par le Juge:-

Q. C'est votre oncle, ça, le père?

R. Oui monsieur.

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Par Mtre.Louis Larue, de la part de l'acccusée:-

Q. Vous y êtes allée seulement qu'une fois en tout et partout?

R. Oui monsieur.

Q. Comment se fait-il que voys ayez juré tantôt qu'il était à votre connaissance que Madame Gagnon l'avait battue une fois avec un éclat, puis trois fois à part de ça, avec un rondin de cèdre, sur les genoux, et une autre fois encore pendant qu'elle lavait la vaisselle, si vous y êtes allée seulement qu'une fois?

R. Elle l'a battue quatre fois.

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Par le Juge:-

Q. Est-ce dans la même journée, ça?

R. Non monsieur, c'est pendant la semaine que j'y ai été.

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Par Mtre.Louis Larue:-

Q.Etes-vous restée là pondant une semaine de temps?

R. Oui monsieur.

Q. Pendant que vous étiez là, la petite Aurore a déserté souvent, elle ne couchait pas là, souvent?

R. Non monsieur, elle a pas déserté.

Q. Elle était désobéissante?

R. Non monsieur.

Q. Pourquoi l'a-t-elle battue avec un éclat de bois?

R. Je ne me rappelle pas pourquoi.

Q. Vous ne savez pas si c'est parce qu'elle avait déserté ou désobéi?

R. C'est pas parce qu'elle avait déserté; c'est parce qu'elle avait désobéi.

Q. Est-ce qu'elle sortait avec les petits garçons, cette petite fille-là?

R. Je ne sais pas.

Q. En avez-vous eu connaissance pendant que vous avez étélà?

R. Non monsieur.

Q. Elle ne sortait pas avec les petits garçons?

R. Non monsieur.

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Source: ANQ, TP9, S1, SS1, SSS999, 1960-01-35769, 3B 023 03-05-002A-01, Cour du banc du roi, assises criminelles, district de Québec, Déposition de Marguerite Leboeuf, enquête préliminaire de Marie-Anne Houde, mars 11, 1920, 5.

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