L’incendie, samedi 10 avril 1734
Samedi 10 avril 1734. La température est particulièrement douce par ce printemps précoce. Les gens qui ont assisté à la prière du soir s’apprêtent à rentrer. Parmi eux, Thérèse de Couagne, veuve de François Poulin de Francheville, propriétaire d’Angélique, une esclave noire.
Sur la rue Saint-Paul, sous l’œil de la sentinelle postée devant l’entrée de l’Hôtel-Dieu, deux petites filles s’amusent dans la rue boueuse. En face de l’hôpital, regardant les enfants, Manon, une jeune esclave panisse discute avec Angélique, qui attend le retour de sa maîtresse. À quelques pas de là, Marguerite César dit Lagardelette est accoudée à sa fenêtre ouverte.
Il est sept heures lorsque la sentinelle lance l’alerte : « Au feu! ». Aussitôt, la cloche de l’hôpital s’ébranle pour être bientôt imitée par celles de l’église et des autres chapelles de la ville. L’incendie a éclaté du côté sud de la rue Saint-Paul, et se propage à l’est de la rue Saint-Joseph (rue Saint-Sulpice).
Le chevalier Boisberthelot de Beaucours, ainsi que le commissaire de la Marine, Honoré Michel de Villebois et de Larouvillière, de même que quelques officiers de justice, prennent la situation en main. Mais le feu est tellement violent que les hommes ne peuvent s'en approcher. Les rues, déjà difficiles d'accès à cause du dégel, deviennent rapidement impraticables. Plusieurs trouvent refuge à l’Hôtel-Dieu avec leurs biens, mais le feu traverse la rue Saint-Paul et embrase l’hôpital. Profitant de la panique générale et malgré la présence des soldats, des gens venus des faubourgs prennent quelques objets dans le couvent et dans les maisons des marchands.
En moins de trois heures, le feu anéantit l'Hôtel-Dieu, détruit 45 maisons et jette plusieurs centaines de personnes à la rue. Le feu s’est propagé rapidement de part et d’autre de la rue Saint-Paul, poussé par un fort vent soufflant de l’ouest.
Dès le lendemain matin, la colère gronde dans la ville. La rumeur se répand qu’Angélique a mis le feu dans le grenier de la maison de sa maîtresse avec la complicité de son amant blanc, Claude Thibault.
Correspondance coloniale
Documents de Cour
- Juridiction royale de Montréal, Déposition de Françoise Léveillé dit La Bouteille, 21 avril, 1734
- Juridiction royale de Montréal, Addition d'information par Louis Dubuisson, 19 mai, 1734
Journaux intimes, carnets de bord ou mémoires
Lettres