Sir Thomas George Roddick – Nécrologie
Sir Thomas George Roddick. C’est dans la consternation générale que la profession a, d’un bout à l’autre du Canada, reçu la nouvelle du décès de Sir Thomas Roddick le 20 février.
Rares seront les hommes de médecine qui auront été si largement et si généralement estimés et qui auront rendu, à tant d’égards, un si grand service à leur pays. Né à Terre-Neuve en 1846, il a d’abord étudié à Truro, en Nouvelle-Écosse, avant de poursuivre des études de médecine à l’Université McGill sous la direction de Campbell, Howard, Sutherland et MacCallum. Il obtient un diplôme avec distinction en 1868, et occupe par la suite les fonctions de chirurgien titulaire, puis de chirurgien traitant au Montreal General Hospital. Il est nommé professeur de chirurgie clinique à la faculté de médecine de l’Université McGill en 1875, professeur de chirurgie en 1890, et est désigné doyen de la faculté de médecine en 1891. Ensuite, quittant du même coup ce poste et la pratique de la profession, il est élu comme représentant de la faculté auprès du corps administratif de l’université. Il était un collègue perpétuellement chaleureux et généreux et un professeur inspirant. Ses patients, envers qui il était toujours bon et jamais sévère, l’adoraient.
Au moment de l’annonce, faite par Sir Joseph Lister, des résultats positifs obtenus en chirurgie grâce à l’utilisation de lotions et de vaporisateurs antiseptiques qui diminuaient l’inflammation et la suppuration, le Dr Roddick est l’un des premiers à reconnaître la grande valeur de cette découverte. Il quitte promptement son travail à l’hôpital et passe trois mois à Édimbourg à observer les travaux de Lister et à maîtriser ses méthodes. À son retour, il met ces méthodes en application au sein du département de chirurgie du General Hospital, qui devient ainsi l’un des premiers établissements en Amérique à suivre les enseignements de Lister. L’hôpital est ainsi reconnu à travers le Canada pour sa valorisation de l’antisepsie et, par la suite, de l’asepsie. Lorsque la British Medical Association accepta l’invitation, lancée par la profession au Canada, à tenir son assemblée annuelle à Montréal, le Dr Roddick est élu président, devenant ainsi le premier président de l’histoire de l’association britannique à être originaire des colonies. Au moment de l’irruption de la Rébellion du Nord-Ouest en 1885, il s’engage et est nommé chirurgien en chef des Forces canadiennes. Ses services lors de cette campagne lui valent d’être mentionné dans des dépêches et recommandé pour l’ordre de C.M.G. Il rend un autre service à la profession lorsqu’il met de côté sa pratique pour représenter au Parlement le district de Saint-Antoine, à Montréal, afin d’y déposer un projet de loi visant à établir un point d’entrée pour pratiquer la médecine à travers tout le dominion. Il souhaitait, grâce à ce point d’entrée commun, unifier la profession disséminée à travers les différentes provinces et permettre aux diplômés, issus de leurs universités respectives, de pratiquer la médecine non seulement dans n’importe quelle province du dominion, mais aussi en n’importe quel point de l’Empire britannique. Il rencontre d’abord beaucoup d’opposition, qu’il réussit graduellement à vaincre, mais pas avant que le Parlement ne soit dissolu. Il représente par la suite ce même district et est peu après en mesure de présenter son projet de loi, connu sous le nom de « projet de loi Roddick », qui sera reconnu par toutes les provinces et qui amènera de nombreux bienfaits à l’instauration de normes communes pourtant aptes à protéger efficacement les droits individuels de chaque province. L’Alexandra Hospital for Infectious Diseases, à Montréal, doit son existence aux initiatives qu’il mène en 1905 et en 1906. Il en occupe le poste de premier président et joue toujours, par la suite, un rôle actif dans ses affaires.
Ces quelques dernières années, la santé de Sir Thomas Roddick s’était détériorée. L’artériosclérose croissante dont il souffrait l’obligeait à abandonner presque entièrement sa pratique privée et à éviter toute réunion mondaine. Il passait ses hivers en Floride, à l’exception de celui-ci, comme son état ne permettait pas l’effort requis par le voyage. Honoré par le roi, par son université ainsi que par sa faculté, et occupant une place de choix dans le souvenir de ses nombreux patients, il a rendu l’âme très paisiblement et a été inhumé au cimetière Mont-Royal.