L’histoire des Premières Nations du Yukon
« Jack le Chilkoot » a guidé le premier homme blanc jusqu’au Yukon , Anton Vogee, 1899, Yukon Archives, YA# 58
On estime qu’à son apogée, la population de ce qui constitue à présent le Yukon était de 8 000 âmes, autour de l’année 1800. Il y a mésentente quant au nombre d’années où les ancêtres de ces habitants ont vécu sur cette partie du continent, parce que cela nous ramène à la question plus générale, à savoir depuis combien d’années les humains sont présents dans le Nouveau Monde. Il est généralement admis que l’Alaska et le Yukon ont été les premiers endroits de l’hémisphère ouest où des humains ont posé le pied après avoir traversé ce que l’on connaît aujourd’hui sous le nom de détroit de Béring par voie de terre, à une époque où le niveau de la mer était beaucoup moins élevé qu’il ne l’est maintenant. Cet évènement s’est certainement produit il y a au moins 14 000 ans, et peut-être même bien plus tôt selon certains experts.
La plupart des autochtones du Yukon sont Athapascans, ou Dénés, apparentés aux Premières Nations de la vallée du Mackenzie, bien qu’on compte aussi, sur la côte de l’Arctique, une population inuit; de plus, une famille tlingit occupe le sud-ouest du territoire et est apparentée aux tribus qui habitent le long des côtes de l’Alaska. À l’époque, ils vivaient de chasse et de cueillette. Ils se déplaçaient en petits groupes sur leurs territoires ancestraux, qui n’avaient pas de frontières fixes, et ils chassaient, pêchaient et récoltaient les fruits de la terre, selon les saisons. En automne, les troupeaux de caribous partaient des environs de la rivière Porcupine pour migrer au nord, faisant vivre les tribus de cette région qui chassaient ces animaux en érigeant deux longues rangées de pieux de bois plantés dans le sol, comme pour baliser un sentier menant à un enclos ou « parc » fait de branches. On amenait les animaux en les effrayant jusque dans ce parc, où ils étaient tués à l’arc.
En d’autres saisons, on attrapait et on faisait sécher du poisson, on cueillait des petits fruits et on chassait des orignaux, des ours, des lapins et des lagopèdes dont on mangeait la chair ou utilisait la peau pour faire des chaussures et des vêtements. Les Tron'dëk Hwëch'in (auparavant appelées les Hans, ces tribus ont abandonné le nom que leur avaient donné les Européens et ont repris leur nom d’origine) vivaient dans le centre-ouest du Yukon et étaient particulièrement doués pour la pêche, ce qui leur permettait de faire du poisson l’élément principal de leur alimentation. Dans toutes les régions du Yukon, c’étaient les ressources que leur fournissaient la terre et les rivières (et, dans le cas des Inuits, les ressources de la mer) qui déterminaient le mode de vie des Amérindiens.
Une théorie intéressante au sujet de leur mode de vie a été émise il y a une quarantaine d’années par l’anthropologue Marshall Sahlins dans un article intitulé "The Original Affluent Society" (La première société riche). Sahlins déclarait qu’il y avait deux façons d’être riche : avoir tout ce que l’on désire et avoir tout ce dont on a besoin. La première n’est pas possible, mais la seconde l’est. Il a étudié plusieurs peuples aborigènes, tant les Dénés que des tribus en Afrique du Sud, et a conclu que les Dénés obtenaient de la terre tout ce dont ils avaient besoin et étaient par le fait même riches. De plus, le temps nécessaire pour obtenir ce dont ils avaient besoin était inférieur au temps requis par les Européens ayant vécu il y a deux cents ans, alors non seulement les Dénés étaient-ils plus riches, mais ils avaient également plus de temps pour raconter des histoires et prendre part à d’autres activités culturelles. En fait, même si elles ont été grandement affectées par les maladies au dix-neuvième siècle, les Premières Nations n’ont été que peu ébranlées par la ruée vers l’or.
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