Pétition au honorable secrétaire d’état aux coloniesAu très honorable L’humble requête d’Alfred Waddington de Victoria, à l’île de Vancouver, et de Bute Inlet en Colombie-Britannique, fait valoir : Que, pendant l’année 1861, il a découvert la vallée de Homathco ainsi que sa rivière en amont de Bute Inlet en Colombie-Britannique; et que cette découverte fut organisée et réalisée à ses frais dans le but de raccourcir le trajet menant aux mines Cariboo qui venaient tout juste d’être découvertes. 1. Que son objectif en agissant ainsi était d’accroître la prospérité des deux colonies en faisant en sorte que ces mines, qui en sont la source principale de revenus, soient à la portée des travailleurs. Car, malgré le fait que les mines de Cariboo soient classées parmi les plus riches au monde, elles sont si loin, le voyage aller-retour de la côte chaque saison est si long et si coûteux, et tout y coûte si cher que seules les concessions les plus riches, elles-mêmes constituant une infime proportion, peuvent être exploitées; conséquemment, la population minière a graduellement diminué pour totaliser aujourd’hui la moitié de ce qu’elle était il y a trois ans, et cela même si les salaires varient entre 9 et 12 dollars par jour. 2. Que cette diminution, ainsi que la détresse générale qui l’a accompagnée, aurait pu être évitée par l’ouverture de la route de Bute Inlet; ses avantages et sa nette supériorité sur toutes les autres routes menant aux mines nordiques sont incontestables, comme on pourra le constater dans les notes à l’annexe A. 3. Que le gouvernement local d’alors s’était montré favorable à l’ouverture d’une route qui présentait de si remarquables avantages, mais que s’étant engagé au tracé passant par le Fraser, il ne pouvait faire d’avances pécuniaires. Une [promesse?] pour une charte fut cependant immédiatement accordée et fut suivie d’autres concessions (pour les détails, voir les notes à l’annexe B) et une entente fut préparée et exécutée « en considération de la découverte de ladite route et de sa praticabilité ainsi que des grandes dépenses encourues ». L’amirauté a inspecté le port et l’a trouvé satisfaisant, les travaux ont été exécutés sous le contrôle du gouvernement et la supervision de ses officiers (dont les dépenses ont été défrayées par votre signataire); de plus, le site de la ville, située en amont de Bute Inlet et nommée Waddington à la demande spécifique du commissaire en chef des terres et des travaux, a été réservé et aménagé, par le Génie du gouvernement, en raison de son importance future. 4. Que cette initiative publique d’une grande utilité, qui, en outre, aurait rapporté 100 000 £ en capital étranger à la colonie, était applaudie avec grande satisfaction par les 4 ou 5000 mineurs et par les marchands de Cariboo ainsi que par toute la population de l’île de Vancouver; au même moment, elle est devenue le sujet d’une grande inquiétude et d’une intense anxiété pour les habitants de New Westminster et pour quelques personnes du bas Fraser qui ne pouvaient pas dissimuler ses avantages et dont les intérêts s’y opposaient naturellement. 5. Que cette entreprise avait entraîné de très [grandes?] difficultés, qui étaient également imprévues, dans un canyon ou un défilé à quelque 32 miles en amont de Bute Inlet, difficultés qui ont finalement été surmontées, et que le grand avancement des travaux avait été expliqué dans une lettre au secrétaire aux colonies de la Colombie-Britannique le 28 novembre 1863 (voir les notes à l’annexe C). Que le travail avait donc repris vers la mi-mars l’année suivante et s’était poursuivi sur une distance de quelques miles passé ledit canyon (voir le Victoria Prices Current du 12 mai 1864, à l’annexe C), lorsqu’une série de massacres sanglants, les plus horribles dans les annales de l’Amérique du Nord britannique depuis plusieurs années, a été commise et fut suivie du pillage généralisé de tout ce qui appartenait au signataire; un chef indien, nommé Anaheim, a reçu comme part de butin des marchandises équivalant au chargement de sept chevaux ainsi que onze chevaux. 6. Que cette insurrection indienne – ainsi qualifiée par le gouverneur de la Colombie-Britannique lui-même dans son discours d’ouverture au Conseil législatif du 12 déc. 1864 – loin d’avoir été le résultat d’une provocation de la part du signataire ou de ses hommes, comme il a été initialement prétendu, avait pris naissance dans le haut pays du territoire chilcotin et était arrivée en raison d’événements entièrement hors de son contrôle. (À ce sujet, voir les notes à l’annexe D.) 7. Que peu après la destruction de son entreprise, votre signataire a écrit au secrétaire aux colonies de la Colombie-Britannique, en date du 28 mai, et il y énumérait ses pertes et offrait de céder, à certaines conditions, la charte pour laquelle il avait tant travaillé. Lettre à laquelle il n’a reçu pour toute réponse que Son Excellence déclinait l’offre, « mais espérait qu’avant longtemps il n’y aurait plus d’empêchements à la reprise du travail malheureusement interrompu ». Qu’il a écrit une nouvelle fois le 9 juin, déclarant qu’il avait une grande quantité de marchandises à Bute Inlet et qu’il y encourait de larges dépenses et demandant 1re « si le gouvernement pouvait lui accorder une protection, disons des hommes, des armes et des munitions, afin de continuer le travail immédiatement », 2e « si le gouverneur était d’avis qu’il pourrait procéder sans cette protection », 3e « et sinon, si une période définie pouvait être établie pour la reprise du travail cette saison », 4e il a aussi demandé si une indemnité lui serait accordée pour ses pertes. Ce à quoi le signataire n’a reçu aucune réponse, à part un refus disgracieux à la 4e question. Le même silence a été accordé à une autre lettre en date du 29 août, qui demandait une autre fois s’il pouvait reprendre les opérations en toute sécurité; et, pendant l’audience qu’on lui a accordée le 3 déc., la seule assurance que Son Excellence pouvait lui donner était « qu’il espérait qu’il pourrait reprendre ses opérations au printemps ». 8. Que votre signataire, ainsi conduit au désespoir, a adressé une requête au gouverneur en Conseil pour recevoir de l’aide, à laquelle requête il vous supplie sincèrement de vous référer (voir la copie à l’annexe E); dans cette requête, il renonçait à toutes concessions ou compensations pour ses pertes et demandait simplement le remboursement des dépenses qu’il avait déjà limitées à 50 000 $ et il a offert verbalement d’échelonner les paiements sur cinq ans. Plus de 63 000 $ ont déjà été dépensés, (excluant l’intérêt à 1 1/2 pour cent par année); dont 2830 $ ont été payés au gouvernement. De plus, sa charte aurait eu une grande valeur. 9. Que votre signataire considère que [illisible] sa requête aurait reçu un accueil favorable parce qu’elle aurait libéré la colonie d’un péage lourd et non remboursable pour une période de dix ans; en même temps, la colonie aurait pu tirer avantage des grandes difficultés qui avaient été surmontées ainsi que des plans, des relevés et des autres renseignements géographiques obtenus après de si lourdes souffrances et à un coût si élevé. 10. Que votre signataire a dû attendre quatre mois (il avait déjà attendu sept mois) pour que sa requête soit envoyée au Conseil législatif, et qu’elle a été envoyée avec un message qui, sauf votre respect, peut difficilement être considéré comme transmettant le sens de la requête, mais qui a clairement exprimé le point de vue et les désirs de Son Excellence. Même en mettant de côté ses arguments, où les pertes de votre signataire sont traitées comme presque imaginaires et où un plan [préconçu?] pour un massacre généralisé est comparé à un vulgaire crime de rue, il y a certains faits dans le message que le signataire se doit de contredire. À ce sujet, avec une copie du message, il vous supplie de vous référer aux notes aux annexes F et G. 11. Que pour revenir à la requête, le Conseil législatif à New Westminster est ainsi [composé?] qu’en présence du message du gouverneur, tous les espoirs d’obtenir un résultat positif étaient vains. La requête n’a même pas été lue ou discutée, mais elle a été sommairement rejetée (voir les notes à l’annexe H sur la réunion) par la résolution suivante : « Que cette chambre, tout en regrettant profondément les grandes pertes encourues par M. Waddington à la suite de l’échec de sa spéculation, n’est pas d’avis que son cas demande un allègement ou une compensation provenant des fonds publics. » 12. Incluse avec une copie de cette résolution, qui ne correspondait même pas à la requête puisqu’il n’y avait rien dans cette dernière au sujet de compensation (comme l’a remarqué à juste titre M. Brew, un des membres), votre signataire a reçu une lettre du secrétaire aux colonies, en date du 7 avril, l’informant que le Conseil exécutif n’avait pas avisé Son Excellence d’accéder à sa requête de reprendre la route. 13. Que les hostilités indiennes, néanmoins, ont continué sans relâche. À tel point que Son Excellence, dans son discours d’ouverture au Conseil législatif du 12 déc. 1864, a déclaré « qu’il ne proposerait aucune loi concernant une politique indienne », laissant ainsi à son sort la moitié de la colonie à l’ouest du Fraser, y inclus votre signataire et ses biens. Depuis, votre signataire a reçu une lettre du secrétaire aux colonies en date du 18 avril qui ne contient aucune [illisible] assurance; non plus que le gouvernement « après avoir fait tous les efforts, (voir le message du gouverneur) pour amener les meurtriers en justice », et ayant si remarquablement échoué dans ses tentatives la saison dernière, ne semble pas vouloir prendre de mesures additionnelles contre les insurgés. À l’exception du précité et rusé Anaheim qui, durant les interrogatoires, a été formellement accusé d’avoir participé à un des meurtres (celui de Manning), et qui n’a rien fait comme chef de sa tribu pour les [illisible] et, de toute façon, a reçu la plus grande part du butin appartenant à votre signataire, a été [gracié?], récompensé et est bien vu, et il promet maintenant, (voir le rapport de M. Ogilvy dans la gazette officielle du 27 fév. à l’annexe I), d’essayer de faire de son mieux pour capturer les treize meurtriers qui sont encore au large; meurtriers qui, avec leurs amis, leurs complices et leur chef, Ahan, sont aussi puissants que lui et prêts à abattre tout homme blanc qu’ils rencontreraient. Qu’avec de telles perspectives, après avoir gardé sa demeure à Bute Inlet inutilement pour une année, votre signataire a été obligé d’abandonner tous ses biens là-bas et est condamné à la ruine absolue, puisqu’il risquerait la vie de ses hommes s’il s’aventurait dans la relance de ses opérations, le gouvernement étant de toute évidence incapable ou réticent à lui accorder une protection en même temps qu’il refuse de reprendre l’entente. Votre pétitionnaire se considère donc autorisé à juste titre (en dehors de toutes concessions morales), à [illisible] de l’entente, étant donné que sa réalisation, après qu’il ait attendu patiemment une année et fait tous les sacrifices, est devenue impossible sans l’assistance du gouvernement; et il fait appel en toute confiance au sens de justice et d’équité du secrétaire d’état aux colonies de Sa Majesté, pour satisfaire la requête juste et raisonnable qui lui a été refusée à New Westminster; ou tout autre secours qui pourrait compenser les grandes privations de cette cause. Le gouvernement intérieur ne répudiera certainement pas ses obligations ou ne déshonorera pas un homme qui, face à de si nombreux obstacles et sans autres ressources que les siennes, a découvert et ouvert une route, avec l’approbation du gouvernement, route qui doublera éventuellement la richesse de la colonie. Il n’y a aucun homme dans une des deux colonies, là où votre pétitionnaire est si bien et si honorablement connu, espère-t-il (à l’exception peut-être de New Westminster), qui pourrait demeurer insensible à une telle vengeance mesquine. Il ne sera pas non plus permis que votre pétitionnaire, après avoir été encouragé par l’ancien gouvernement et ensuite abandonné pour assumer seul les risques de cette entreprise publique, devrait à la veille du succès, voir ses hommes être massacrés, le cœur de son contremaître arraché de son corps, coupé en pièces et dévoré, leurs corps nus traînés et jetés dans la rivière ou jetés aux loups, son campement détruit, ses marchandises pillées, ses livres et [papiers?] déchirés en morceaux et jetés aux quatre vents, lui-même repoussé et ruiné par des délais interminables; et que la colonie devrait être la seule à cueillir les bénéfices futurs, mais non moins certains, de tels procédés injustes. Et votre pétitionnaire, comme il se doit, ne cessera de prier Alfred Waddington Victoria, île de Vancouver, 29 mai 1865 Source: Great Britain Public Record Office, Colonial Office Records, CO 60/22, p. 192, 8623, Alfred Waddington, Pétition au secrétaire d’État aux colonies, 29 mai 1865.
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