Lettre de Norman au sujet d’une conversation avec le général MacArthur
Mission de liaison canadienne
Tokyo
24 mai 1950
No 319
CONFIDENTIEL
L’honorable Secrétaire d’État
aux Affaires extérieures,
OTTAWA, Canada.
Monsieur,
J'ai l'honneur de vous rapporter une conversation que j'ai eue hier avec le général MacArthur. La raison principale de notre rencontre venait du fait qu'un certain nombre d'articles avaient été publiés dans les journaux au cours des dernières semaines et que ces articles contenaient des informations imprécises et contradictoires sur la politique américaine envers le Japon comme le maintien de bases militaires.
[...]
5. Un bilan rapide concernant d'autres problèmes dans cette partie du monde met en lumière les opinions suivantes du général :
6. Se fiant à ses connaissances, si les communistes décidaient d’attaquer cette année pour s’emparer de Formose, les possibilités qu’ils gagnent ou qu’ils perdent sont à peu près égales. Leur unique chance de succès était la démoralisation croissante des nationalistes. Cependant, selon lui, les communistes seraient très hésitants à entreprendre une action aussi risquée sans avoir au préalable accumulé beaucoup plus de matériel, car, s’ils devaient se retirer après avoir subi une cuisante défaite, ils perdraient énormément de prestige en Chine.
7. En Corée, il s’attendait à ce que Sygnman [sic] Rhee et ses partisans gagnent les prochaines élections. Après tout, a dit le général, quelle chance y a-t-il de former une opposition lorsque 14,000 opposants sont en prison, sans procès et sans espoir de procès? Toute opposition à Syngman Rhee est rapidement cataloguée de « communiste » même si, affirme le général, c’était tout à fait faux dans la grande majorité des cas.
8. Selon le général MacArthur, les élections à la Chambre des conseillers qui doivent se ternir au Japon au début de juin devraient donner une légère avance au présent gouvernement libéral. Les libéraux ne réussiront pas à obtenir la majorité, mais ils pourraient disposer du plus grand nombre de sièges parmi tous les partis. Avec la faction conservatrice, le Ryokofukai, ils pourraient même être capables d'obtenir une légère majorité au Sénat. Il s’attendait à ce que les communistes aient de piètres résultats à cette élection, en grande partie à cause de leur impopularité croissante à la suite des critiques du Kominform et à cause de la question du rapatriement. Il ne pensait pas que le gouvernement proscrirait les communistes même si leurs tactiques devenaient de plus en plus turbulentes.
[...]
Je vous prie d’agréer,
Monsieur,
l’expression de ma considération distinguée,
[signé E.H. Norman]
E.H. Norman,
Chef de la mission de liaison canadienne
au Japon