Protestation du gouvernement canadien

Canada, Chambre des communes, Débats

10 avril 1957, p 3517

AFFAIRES EXTÉRIEURES

ÉTATS-UNIS – PROTESTATION ET RÉPONSE AU SUJET DE L’ACTIVITÉ DE LA COMMISSION DU CONGRÈS TOUCHANT LES CANADIENS

L’hon. L. B. Pearson (secrétaire d’État aux Affaires extérieures): Monsieur l’Orateur, ainsi que je l’ai déjà dit à la Chambre, nous avons protesté, formellement et énergiquement, auprès du gouvernement des États-Unis, de la seule façon dont il nous fût possible de le faire, contre le geste de certains membres de la Sous-commission de la sécurité du Sénat des États-Unis qui ont rendu publiques, des années après leur première apparition, certaines insinuations calomnieuses contre le loyalisme d’un haut fonctionnaire canadien, ce qui a contribué à produire les tragiques résultats qui nous ont si fortement émus et attristés.

La note de protestation dont j’ai parlé était datée du 18 mars. Elle était adressée au Secrétaire d’État du gouvernement américain. Elle émanait de notre ambassadeur à Washington. En voici le texte :

Monsieur le Ministre :

Je suis chargé par mon gouvernement de porter à l’attention du gouvernement des États-Unis les accusations de déloyauté qui ont été lancées aux États-Unis contre M. E. H. Norman, ambassadeur du Canada en Égypte, haut représentant du gouvernement canadien, dont il avait la confiance. Les accusations dont il s’agit, lancées à la légère et qui de toute façon ont trait à des questions relevant du gouvernement canadien et non pas d’une sous-commission du Sénat des États-Unis, figurant dans le compte rendu textuel de la Sous-commission de la sécurité intérieure, organisme rattaché à la Commission des questions judiciaires du Sénat; ce document a été remis officiellement à la presse par la Sous-commission le 14 mars, à 4 heures 30 de l’après-midi, à Washington (D.C.).

J’ai reçu instructions de protester de la façon la plus énergique contre le geste de l’organisme officiel du pouvoir législatif du gouvernement des États-Unis qui a ainsi formulé et publié des accusations contre un fonctionnaire canadien. Cette manière d’agir est à la fois étonnante et troublante, car le gouvernement des États-Unis n’a ni consulté ni informé le gouvernement canadien et il n’a été fait aucun cas des déclarations publiques pertinentes faites antérieurement par le gouvernement canadien.

Le gouvernement canadien a examiné des allégations semblables dès 1951 et, par suite d’une enquête approfondie en matière de sécurité, son entière confiance en la loyauté et l’intégrité de M. Norman a été confirmée à tous points de vue. Les conclusions du gouvernement canadien ont été alors rendues publiques et devaient être connues de la Sous-commission, sachant que le Département d’État avait été prié à ce moment-là, et de nouveau le 11 décembre 1952, de les lui signaler. J’annexe à la présente les textes de deux déclarations faites à ce sujet en 1951 par le gouvernement canadien.

La répétition de telles allégations irréfléchies au sein de la Sous-commission et la publication, avec l’autorisation de cet organisme officiel, d’un dossier renfermant lesdites allégations est un acte incompatible avec la collaboration amicale qui caractérise de longue date les relations entre nos deux pays.

Veuillez agréer, Monsieur le Secrétaire d’État, les assurances renouvelées de ma très haute considération.

A.D. P. Heeney

Aujourd’hui, monsieur l’Orateur, j’ai reçu un document signé du Secrétaire d’État par intérim des États-Unis d’Amérique, en réponse à la communication dont je viens de donner lecture. En voici le texte :

Monsieur l’Ambassadeur:

J’ai l’honneur de me référer à la Note no 155, en date du 18 mars 1957, par laquelle vous protestez, au nom du gouvernement canadien, contre certaines allusions qui ont été faites à feu M. E. H. Norman, ambassadeur du Canada en Égypte, au cours des audiences de la Sous-commission de la sécurité intérieure du Sénat et qui ont par la suite été rendues publiques.

Permettez-moi d’abord de présenter au gouvernement canadien et à madame Norman mes sincères condoléances et celles de mes collègues à l’occasion de la mort de M. Norman, ambassadeur au Caire.

Quant à la question qui fait l’objet de votre note, je tiens à vous assurer que tous renseignements défavorables mis au jour aux audiences de la Sous-commission n’ont été consignés dans le compte rendu que par la Sous-commission agissant de sa propre initiative. Ainsi que vous le savez dans notre système de gouvernement le pouvoir exécutif n’a aucune autorité sur les expressions de vues ou d’opinions des membres et ou commissions du Congrès. L’enquête entreprise par la Sous-commission relève entièrement et uniquement de la Sous-Commission.

Mon gouvernement désire vivement conserver les relations les plus amicales avec le gouvernement canadien et il déplore tout événement provenant de sources aussi bien américaines que canadiennes, qui soit de nature à nuire à ces relations.

Veuillez agréer, Monsieur l’Ambassadeur, les assurances de ma très haute considération. [...]

[Note de la traduction : à l'exception de quelques erreurs typographiques que nous avons corrigées, ce texte reproduit la traduction extraite du Compte rendu officiel des débats de la Chambre des Communes]

Source: Canada, House of Commons, Debates, Various, Protestations du gouvernement canadien, 10 avril 1957, 3357

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