Séance d’urgenceThe Daily British Colonist, 2 juin 1864. Suite à une demande signée par des citoyens, une assemblée publique a été tenue hier soir au théâtre par monsieur le maire afin de déterminer les meilleures façons de consolider la position du gouvernement sœur dans le but de punir les auteurs des récents massacres et de les mettre en lieu sûr, et de protéger la vie des sujets de Sa Majesté qui habitent les colonies de la Côte-Ouest de la Colombie-Britannique. Au début de la soirée, une foule remplissait le théâtre à craquer et manifestait le plus grand intérêt pour les débats. Le maire, acclamé à son arrivée, a ouvert la séance à 20 h. Sur la plate-forme se trouvaient messieurs A. Waddington (qui a été chaudement applaudi), A. DeCosmos, MAL; le Révérend A.C. Garrett; Geo. Cruickshank; C.J. Hughes; Dr Dickson; C.B. Young; P.M. Backus; Robert Bishop; A.C. Elliott; R. George, E. Mallandaine, et autres. Le président a exprimé sa peine face aux événements à l’origine de cette assemblée. Il a déclaré que la réunion a été réclamée par la population, et qu’il espère que plus jamais il n’aura à se présenter devant elle pour une telle raison. Il a souhaité que la population se mette cordialement d’accord pour aider le gouvernement de la Colombie-Britannique à traduire en justice les auteurs des récentes tragédies et que les participants pourront protéger courageusement la vie de leurs compatriotes. (Bravo!) Il a terminé en faisant allusion aux tristes événements et a invité tout le monde à venir s’exprimer sur la plate-forme. M. DeCosmos a été appelé à proposer la première résolution. Il considérait l’événement à la source de l’assemblée demandée par la population comme un événement qui ne devrait faire tressaillir personne. Il croit avoir été parmi les premières personnes à soulever le problème de la route côtière de Bute, et il n’avait alors pas pensé qu’il serait maintenant obligé d’exprimer les sentiments de la collectivité face à de tels outrages. Il a proposé qu’il soit : Résolu, - Que toute la collectivité a appris avec une tristesse sincère et la plus grande indignation la nouvelle du meurtre de nos compatriotes commis par des Indiens de la Colombie-Britannique, et éprouve une grande anxiété face aux dangereuses conditions dans lesquelles se trouvent les colonies périphériques et les localités minières de cette colonie et de la colonie voisine. Il a, par cette résolution, exprimé librement ses opinions; nous étions tous désolés que les hommes qui ont participé à cette opération aient péri. Nous étions tous indignés avec raison. Pour nous, c’était une question d’autoprotection et nous étions obligés de prendre des mesures contre les contrevenants indiens de manière pratique. Nous devrions traiter les Indiens de la façon suivante : lorsqu’un meurtre est commis, une vie devrait être sacrifiée en revanche. La seule loi que connaissent les Indiens est œil pour œil, dent pour dent. (applaudissements) Toute indulgence n’a fait qu’ajouter à l’audace de leurs crimes. Il a hérité d’une antipathie et d’une haine à l’égard des Indiens et n’éprouvait pas comme d’autres une sympathie malsaine pour eux. Il avait vécu parmi les Indiens et connaissait leur perfidie. Il savait ce que c’était que de marcher à quatre pattes derrière eux, son couteau Bowie dans la bouche, et avait acquis son antipathie pour les sauvages à cause des outrages commis envers sa propre famille. Selon les principes généraux d’humanité nous devrions sécuriser nos colonies, et il ne connaissait pas d’autres façons que répartir nos navires de guerre et nos armés de volontaires sur la côte pour réprimer avec un bras de fer les crimes dès qu’ils sont commis et montrer aux Indiens qu’ils ne pourraient commettre leurs atrocités en toute impunité. Il a fait allusion à la triste nouvelle du décès de McDonald, qui était un pionnier comme le major Downie bien connu dans cette ville, et a rendu hommage à M. Waddington, pour qui il désirait voir le public exprimer sa sympathie; croyant que cet homme respectable était non seulement digne de la sympathie mais aussi d’une compensation pour les pertes qu’il a subies suite aux actes des sauvages. Le révérend M. Garrett a appuyé la résolution. Il était heureux d’endosser les sentiments de son respectable et honorable représentant. Il fut un temps où ses opinions sur la réputation des Indiens différaient de celles de M. DeCosmos. Ses opinions ont maintenant changé; j’ai appris que nous devrions traiter les Indiens avec vérité, justice et sévérité. [Les reporters ont à ce moment été interrompus par une personne violente qui frappait bruyamment à la porte de la loge]. L’orateur a poursuivi : Les hommes blancs ne pouvaient calmement être des témoins alors que leurs frères se faisaient arracher le cœur et c’est la plus résolue des déterminations qu’ils devaient montrer aux Indiens que ces crimes méritent la punition la plus adéquate. Il était assuré qu’il ne s’écoulerait qu’un court laps de temps avant que les procédures de la soirée soient traduites dans toutes les langues indiennes et transportées par leurs canoës rapides dans les tribus les plus éloignées. Il savait bien qu’un sentiment profond d’hostilité existait entre les différentes tribus et envers les Blancs, mais il était tout à fait possible que les Indiens puissent faire taire leur animosité la plus profonde pendant qu’ils collectionnaient leurs butins de guerre et buvaient le sang des Blancs. Il ne croyait pas qu’ils pouvaient maintenir longtemps une opération concertée mais que s’ils réussissaient à maintenir une telle opération assez longtemps pour sacrifier la vie de vingt Blancs, cette image était suffisamment horrifiante pour justifier la prise des mesures de répression les plus rigoureuses. Lorsque les Indiens sentaient le bras de fer des hommes blancs, ils étaient aussi doux et trouillards que des chatons, mais lorsqu’ils ont vu nos canonnières traverser l’étroit bras de mer sans qu’aucun coup de feu ne soit tiré, [applaudissements enthousiastes et continus] que pouvions-nous espérer d’autre que l’esprit des démons qui possède leur sang ne s’éveille à d’abominables atrocités. Nous profitons de cette occasion pour exprimer notre sympathie envers le pionnier de la civilisation et du progrès [applaudissements bruyants] mais aussi aux femmes et aux enfants de nos hommes qui ont été assassinés, et nous devrions prendre les mesures nécessaires pour protéger les [illisible] de nos villes que nous étions tenus de nourrir et que nous devrions considérer comme le soutien principal de notre future prospérité. [Applaudissements enthousiastes]. Le président a appelé M. Waddington qui s’est avancé dans un tollé d’applaudissements. M. Waddington a déclaré qu’il n’était pas là pour raconter son histoire personnelle mais, en dépit de son âge avancé, il avait encore un peu de sang dans les veines et ne pouvait s’empêcher d’exprimer ses sentiments. Il a relaté les événements dont le public avait déjà été informé par les journaux de la ville. Il a fait allusion au meurtre des trois hommes à Bella Coola et a dit qu’il a pressé le gouverneur Seymour d’envoyer un navire de guerre à Bella Coola pour prévenir de futurs assassinats, mais pour certaines raisons, il a été décidé qu’aucun navire ne devrait être envoyé. Pourquoi, il ne pouvait pas répondre. Le Columbine était en réparation et les canonnières ne pouvaient non plus être envoyées (sifflements et cris assourdissants, Honte! Honte!). M. Waddington a brièvement donné son opinion sur la façon dont les derniers meurtres ont été commis. Il a dit croire fermement que les Indiens, les mains déjà inondées de sang, avaient tué tous les habitants de Bella Coola et il en comptait douze sur le bout de ses doigts (grande excitation). Parmi les victimes, on comptait M. et Mme Hamilton, leur fille de quatorze ans et un garçon de douze ans, en plus de Wallace, Stuart, et autres citoyens dont il avait oublié les noms. Si une canonnière avait été envoyée à Bentinck Arm dès que la nouvelle du premier meurtre eût été connue, toutes ces vies auraient pu être épargnées. Il a seulement ajouté que lorsqu’il a vu le corps mutilé de son pauvre contremaître, Brewster, il s’était simplement tourné vers le ciel pour l’aider à garder son sang-froid, mais qu’il se tournait vers ses compatriotes pour obtenir justice (tonnerre d’applaudissements). Le colonel Percy du 18th Royal Irish a affirmé que lorsque pour la première fois il a entendu parler du massacre, il avait écrit au gouverneur Seymour, mais n’avait pas reçu de réponse. Il offre maintenant gratuitement ses services au gouvernement. La première résolution a ensuite été soumise et adoptée à l’unanimité. En proposant la deuxième résolution, M. P.M. Backus a déclaré qu’il avait peu à dire après le révérend M. Garrett. Il avait seulement le sentiment, après avoir lu les derniers comptes rendus, qu’il fallait maintenant donner l’occasion aux hommes de se battre. Il a proposé ceci : Résolu, - Compte tenu du fait qu’un grand nombre des victimes du massacre perpétré dernièrement par les Indiens appartenaient à cette colonie et que leurs familles résident ici, les colons de l’île de Vancouver considèrent [4 mots illisibles] de leur devoir de demander à Son Excellence le gouverneur [trois mots illisibles] Son Excellence le gouverneur de la Colombie-Britannique, les services de pas moins de cent hommes, entièrement armés et équipés [pour aider les ?] autorités de Colombie-Britannique à la [découverte?] et la capture des meurtriers. Il [trois mots illisibles] ils en capturaient un, ils le pendraient sur-le-champ. [Acclamations frénétiques] M. Hughes a appuyé. Il a préconisé les actions plutôt que les mots. L’autorité civile était habilitée à traiter avec les Indiens; il espérait que la force armée ne se limiterait pas à cent individus, mais que nous devrions rassembler une puissante armée afin de montrer au sauvage qu’il ne pouvait pas fouler le sang de l’homme blanc. [Acclamations frénétiques] Nous ne pouvons faire revivre les morts mais il croit que nous devrions venger leur mort. [Acclamations] Il a parlé en connaissance de cause des difficultés d’une guerre contre les Indiens et a terminé en souhaitant que nos volontaires puissent, en temps opportun, rassembler de 300 à 500 hommes. [Acclamations] M. C.B. Young a affirmé qu’un crime atroce avait été commis de sang-froid mais il y avait encore une petite voix à l’intérieur de lui à laquelle il accordait plus d’importance qu’à celles des personnes devant lui et il leur a demandé de patienter. Il a entendu parler de la justice faite aux Indiens, mais il considère que justice n’a pas été faite aux autochtones. Il a parlé du fait qu’aucun agent indien n’avait été nommé et que la règle de la Baie d’Hudson laquelle, selon lui, ne suffirait pas en ce moment. L’orateur s’apprêtait à expliquer son point de vue lorsqu’il a été interrompu et s’est assis, mais a été rappelé et a expliqué comment les Indiens avaient été évincés de leurs lopins de patates à Bentinck Arm et il a demandé comment les Saxons se sont sentis face aux Normands lors de l’invasion. Il a ajouté que les Indiens étaient tout aussi pourvus de sentiments que nous et qu’ils devraient être traités en toute justice. Révérend Dr Evans a fait quelques remarques appropriées à l’appui de la résolution croyant, d’après ses connaissances de la nature des Indiens, que des efforts énergiques étaient nécessaires pour asséner un coup aux auteurs cruels et déloyaux des récents crimes, même s’il croit en même temps que les Indiens n’ont pas été traités raisonnablement en ce qui concerne la compensation. Mais il a préconisé relativement à cette affaire des mesures promptes et décisives; un conseil de guerre si nécessaire. [Bravo! Bravo!] Une voix – et la pendaison! Oui et pendaison sur-le-champ aussi [acclamations]. Le président a appelé M. Bing, qui a fait quelques commentaires. Il a déclaré que s’il y a une chose qu’il déteste plus que tout, c’est le sectarisme national et si une telle position était adoptée, il serait un des premiers à la condamner. Il ne croyait pas que la population de la Colombie-Britannique refuserait l’aide de personnes vaillantes et courtoises comme celles auxquelles il avait alors l’honneur de s’adresser. [rires] Il a demandé à l’assemblée de rejeter ce qu’il qualifierait de sectarisme social et de voir simplement si les Indiens se sont comportés de façon hostile ou comme des meurtriers immoraux. Un groupe d’aventuriers s’était rendu dans les régions sauvages pour effectuer un travail estimable, et ils ont été tués avec cruauté et perfidie. L’orateur a un continuer de parler mais la foule s’est mise à siffler et à grogner et lui a crié de s’asseoir! Assis! Assis! etc., et il s’est finalement assis. M. DeCosmos a demandé la permission de faire quelques commentaires sur les propos de l’orateur précédent en ce qui concerne la jalousie entre cette colonie et la Colombie-Britannique. Il ne croyait pas qu’un tel sentiment existât sur ce point. (applaudissements) Avant de soumettre cette résolution au vote, le président a dit qu’il avait rendu visite au gouverneur avant de venir à cette assemblée et que Son Excellence lui avait dit de dire que peu importe ce que l’assemblée déciderait ce soir, elle recevrait son approbation et son appui et qu’il avait aussi mille armes qu’il placerait à leur disposition, peu importe ce qu’ils décideraient de faire. (Applaudissements à faire crouler la salle) M. Robt. Bishop a affirmé qu’il a investi corps et âme dans le mouvement pour punir les mécréants qui avaient commis les récentes atrocités et qu’il était certain que les habitants de la Colombie-Britannique collaboreraient de tout leur coeur avec la population de Victoria. Il s’est opposé aux remarques d’un orateur précédent (M. Young) qui a dit « J’ai vécu parmi les Indiens. Des fusils [illisible] ont été pointés vers moi, mais on ne m’a pas tué car j’ai été honnête envers eux ». Donc, ceux qui ont été tués avaient agi avec malhonnêteté. (Non! Non!) Il croyait être arrivé à une conclusion juste. Je connaissais personnellement un des hommes assassinés et il était un des jeunes hommes les plus francs et les plus honnêtes. Il pensait que si deux ministres avaient considéré la cause juste et sainte, l’assemblée pourrait ne ressentir aucun remord et devrait agir promptement. Il a proposé la résolution suivante : Résolu, - Qu’une liste d’enrôlement des personnes qui désirent se porter volontaires dans l’armée soit rendue disponible demain pour être signée au bureau de Selim Franklin & Co., les noms seront soumis au gouverneur; et qu’un comité soit désigné pour remettre à Son Excellence un exemplaire des résolutions précédentes, avec pouvoir de le consulter pour le compte de cette assemblée sur les moyens nécessaires à la mise en œuvre desdites résolutions; ce comité sera nommé par monsieur le maire. M. Alfred Elliott a appuyé la résolution et a émis quelques commentaires en ce qui concerne l’intérêt de garder une armée de volontaires dans un état efficace et approprié d’organisation. M. E. Mallandaine a préconisé une action vigoureuse au nom de l’humanité et des politiques. Il croyait que l’armée ne devrait pas être dépêchée à moins qu’elle ne soit assez puissante pour réaliser l’objectif. Le maire a déclaré qu’il avait oublié de dire que Son Excellence avait affirmé qu’il n’avait rien reçu pour justifier l’hypothèse que la population de la Colombie-Britannique ne coopérera pas de bon cœur avec les habitants de cette île. (acclamation) Révérend Archidiacre Wright a ajouté un nouvel éclairage sur la dernière expédition à Bute Inlet. Il a aussi dit qu’il avait à son arrivée ici entendu parler pour la première des discordes entre les populations des deux colonies. Il a rassuré l’assemblée que la population de New Westminster accueillerait avec joie une aide de Victoria dans une telle cause. (Bravo! Bravo!) L’égoïsme commun le dicterait, si l’humanité ne l’avait pas fait (applaudissement). Il a expliqué certaines des difficultés auxquelles le groupe de volontaires aurait à faire face en pénétrant dans cette région et leur a demandé d’étudier l’affaire sérieusement avant de s’investir et, que s’ils décidaient de participer, de mener l’expédition avec courage (applaudissement). Le président, conformément à la résolution précédente, a ensuite nommé les hommes suivants au comité : A. DeCosmos, M., M.A.L., le révérend Dr Evans, Alfred Waddington, M., C.B. Young, M., révérend A.C. Garrett; le président et le secrétaire qui seront membres d’office. Après un vote de remerciements sincères destinés au maire et acceptés par lui, l’assemblée s’est calmement dispersée. Source: "Séance d’urgence," Daily British Colonist, 2 juin 1864.
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