La route de Bute InletThe British Colonist, 1er août, 1862 Rédacteur en chef, British Colonist :- Tant et aussi longtemps que l’incertitude a persisté dans l’opinion publique quant à la possibilité de construire une route côtière de Bute Inlet vers les terres, j’ai pris soin d’éviter de vous parler de ce sujet. Cette attitude, que vos lecteurs apprécieront, n’est pas le résultat de quelque doute de ma part au sujet des renseignements, qui ont recueillis au prix de beaucoup d’argent et de nombreuses difficultés, mais plutôt d’un sentiment de retenue. Mais maintenant que la dernière expédition a permis d’atteindre l’objectif visé et que mes prévisions ne sont plus une simple vision, il est de mon devoir de satisfaire la curiosité du public sur un sujet qui suscite tant d’intérêt présentement dans la Colonie, et de donner quelques détails concernant une route qui doit devenir la voie de communication la plus rapide, la moins dispendieuse et la plus facile d’accès vers les mines du Nord. L’expédition d’exploration, à laquelle il est fait allusion, et qui a quitté Victoria le 15 mai, se composait de M. Tiedeman, ingénieur, et de quatre autres hommes, dont un parlait la langue chilcotine, en plus de trois Indiens. Le trajet de retour, dirigé par Henry McNeill, a quitté Alexandria le 4 juillet et a atteint le point de départ des eaux navigables le 15. Une journée a été perdue pour cause de maladie et une autre pour des fins d’approvisionnement. Le trajet s’est donc fait en onze jours. La première portion du sentier qui relie Alexandria à la rivière Chilcotin est bien connue. Elle traverse la vaste plaine qui s’étend dans cette direction, et qui constitue l’une des caractéristiques les plus remarquables du pays. Ce plateau élevé et légèrement vallonné se situe à une altitude d’environ 4 000 pieds du niveau de la mer et de 1 200 à 1 500 pieds du niveau du Fraser, à Fort Alexandria. Il s’étend du nord au sud, des berges de la rivière Stuart à l’embouchure de la rivière Chilcotin, ce qui représente 160 milles géographiques; sa largeur moyenne est de 100 milles de l’ouest au sud-est; et il s’étend dans cette direction jusqu’au pied de la chaîne des Cascade, dont il diminue considérablement la hauteur sur le versant est. Cette vaste plaine est drainée par de petites vallées et parsemée de nombreux lacs; elle est entièrement couverte de touffes de graminées luxuriantes et, en quelques endroits, de bouquets d’arbustes et de broussailles. Le climat doit être suffisamment doux pour permettre l’activité agricole, puisque les chevaux des Indiens passent l’hiver dehors sans fourrage. Comme je l’ai mentionné plus haut, le sentier traverse cette plaine en direction sud-ouest, passe tout près du lac Saunders, et de là, atteint le bord d’un autre lac, appelé Pautza, lequel se déverse dans la Chilcotin et se situe aux environs de la ligne de partage des eaux qui sépare imperceptiblement le bassin du Fraser du Pacifique. Ce lac fait approximativement 9 milles de long et 3,5 milles de large, s’étend du nord au sud, se trouve à environ 75 milles d’Alexandria, et constitue le point de rencontre des sentiers de Bute et de Bentinck Arm. Au lac Saunders, qui fait à peu près 8 milles de long, le groupe a rencontré 20 mineurs qui se rendaient à Cariboo, et, le lendemain, trois mineurs qui arrivaient de la rivière Stikeen. Ces hommes étaient en chemin depuis 14 ou 15 jours et leur compte rendu faisait état d’une route plutôt difficile. Par ailleurs, au lac Pautza, là où il y a deux villages, les Indiens estiment que la route de Bute Inlet permet de gagner au moins quatre jours sur celle de Bentinck Arm. Au lac Pautza, le groupe s’est procuré deux guides. Après avoir parcouru six milles en direction sud-ouest en terrain plat, ils ont atteint l’extrémité du lac Talca, dont les eaux se jettent dans le bras nord de la rivière Homathco, aussi appelée Bute. Orienté dans la même direction, ce lac fait 30 milles de long et de 1,5 à 2 milles de large; ses rives sont plates et composées de limon, et se trouvent à 20 pieds du niveau de l’eau; son courant permet à des embarcations légères d’y naviguer. Quelques milles plus bas, un affluent venant de l’ouest s’y jette, et encore cinq milles plus bas, se trouve un village indien, près de la rive ouest de la rivière. C’est là que le groupe s’est arrêté une journée pendant que les guides faisaient provision de poisson et d’autres aliments. Le lendemain, ils ont traversé un autre cours d’eau venant de l’ouest, d’une largeur d’environ 50 pieds, et ont franchi une petite colline d’environ 300 pieds de haut pour éviter la rivière, ce qui n’empêche pas qu’une route pourrait aisément être construite à son pied. Le lendemain, c’est-à-dire le 14, le groupe a poursuivi son chemin le long de la rivière, qu’il a traversée deux fois. Elle demeurait navigable, son courant était d’environ deux ou trois milles à l’heure, sa largeur moyenne était de 100 verges, et elle avait une profondeur d’environ six pieds. Selon les guides, son niveau le plus bas ne se situe jamais en deçà de trois pieds. Cette journée-là, ils ont franchi plusieurs coteaux pour éviter la rivière. Puis le terrain est redevenu plat et des champs qui conviendraient au pâturage s’étendaient sur plusieurs milliers d’acres. Le 15, ils ont traversé plusieurs marécages d’une longueur d’un demi acre ou moins et d’une largeur de 50 à 100 pieds, mais ce furent les seuls qu’ils rencontrèrent sur tout le trajet. Jusqu’alors, la route était sèche, dure, dégagée et plate, à l’exception des coteaux dont j’ai parlé plus haut, dont le plus haut doit faire environ 50 pieds. Le 16, le groupe s’est introduit dans la vallée qui constitue l’ouverture à travers la chaîne des Cascade; trois milles plus bas, la rivière est obstruée par des roches et au bout de sept milles, c’est-à-dire quatre milles plus loin, elle atteint les fourches. C’est là qu’elle se jette dans le bras est, ou bras principal, de la rivière Homathco. Cette rivière majestueuse qui serpente en direction sud-ouest et, plus tard, en direction sud, du lac Talca à la chaîne des Cascade, ne présente pas de difficultés, de rochers, de rapides, ou de courbes soudaines; ses rives sont couvertes de sapins et de cyprès qui montrent les signes d’une croissance exceptionnelle; et des embarcations légères peuvent certainement y naviguer pendant une bonne partie de l’année. La rivière et le lac constituent une voie de communication d’une longueur de 95 milles Les vallées creusées par les deux rivières forment un angle important aux fourches. Pour l’éviter, le groupe a pris un raccourci et franchi un glacier qui descend environ trois milles plus bas, à partir d’une gorge située sur le versant ouest. Ce glacier a une largeur d’environ un demi mille à l’endroit où ils l’ont rencontré et une épaisseur de 50 à 100 pieds par-dessus un ruisseau de montagne, et semblait recouvrir la gorge sur une distance de quelque huit milles. Il était du bleu glacial le plus clair et couvert de pierres et de cailloux. Il s’agit du deuxième glacier sur la route de Bute Inlet qui descend au même niveau que la vallée. Le groupe est alors arrivé aux deux collines qui avaient été explorées l’automne dernier et qui constituent la seule difficulté de tout le trajet. La première ne pose pas problème, mais la deuxième obstrue totalement la vallée et sa hauteur atteint entre 700 et 800 pieds, dont une portion de 300 pieds est très escarpée. Le col est inévitable mais peut être surmonté aisément en faisant passer le chemin de roulage par une ravine dont l’existence a été découverte l’année dernière. Le vieux guide a indiqué qu’elle se trouvait à environ quatre milles au-dessus de la vallée, mais il a fait remarquer que ce sentier allongeait la distance d’environ un mille et demi. Sur le versant sud du col, la pente est très graduelle. Le sommet du col s’étend sur une distance d’environ un mille du canyon, à l’endroit où la rivière s’engouffre dans une mince crevasse perpendiculaire, ce qui forme, pour ainsi dire, une faille dans l’arête de la chaîne des Cascade. Le col s’étend sur le côté ouest de cette profonde fissure, au fond de laquelle il semble y avoir une pente perpendiculaire de 60 ou 80 pieds où se jette la rivière; ses eaux mousseuses et turbulentes s’échappent deux ou trois cents verges plus loin par le sombre abysse situé plus bas. À cet endroit, la rivière forme un vaste torrent d’une longueur d’environ deux milles jusqu’au traversier, où le sentier l’enjambe; elle coule alors plus doucement pendant huit autres milles et ses eaux deviennent entièrement navigables par les navires à vapeur, puis elle serpente pendant 36 milles à travers une vallée splendide jusqu’à l’embouchure de Bute Inlet. La distance totale de la route, telle que décrite, sera :
Dont 113 milles de route terrestre seulement ! Victoria, 31 juillet 1862. Alfred Waddington P.S. Le groupe a aperçu la goélette Shark, propriété du gouvernement, le 22 du mois courant, alors qu’elle faisait de l’arpentage près de l’île Savary. Source: "La route de Bute Inlet," British Colonist, 1 août 1862.
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