Hector Charlesworth, « Des toiles qu’on peut entendre », Saturday Night, 18 mars 1916
Une vue d’ensemble de l’exposition de l’Ontario Society of Artists
Le futurisme appliqué ou « quasi-futurisme » s’est emparé de façon étrange du comité d’exposition de l’Ontario Society of Artists cette année, et ceux qui croient qu’une toile devrait être vue et non entendue vont probablement être choqués à la vue de certaines des œuvres exposées cette année. Il s’agit peut-être d’un des devoirs de l’artiste de nous étonner et de nous sortir de nos habitudes mentales, mais il n’est pas nécessaire de nous arracher les yeux au passage. L’auteur apprécie, en général, l’innovation, en autant qu’elle révèle quelque chose de nouveau, mais la toile à laquelle on fait ici allusion ne semble pas avoir été inspirée par une réelle passion pour la beauté, cachée ou révélée au grand jour, mais plutôt par l’idéal du directeur de théâtre de vaudeville dont la devise est « Mets-leur-en plein la vue » […]
Principalement, ce que l’on peut reprocher aux toiles expérimentales est de détruire l’effet des toiles absolument méritoires et sincères qui sont accrochées aux mêmes murs. Le pire des contrevenants semble être J. E. H. MacDonald, qui jette directement ses pots de peinture à la figure du public. […] [En parlant du « Jardin sauvage »] Premièrement, la toile est beaucoup trop grande pour l’importance relative du sujet et la vulgarité des couleurs semble avoir plu davantage au peintre que de faire le tracé délicat de la végétation; mais il s’agit d’un chef-d'œuvre en comparaison avec « Les Éléments » et « Rocher et érable », qui auraient tout aussi bien pu s’intituler « Goulache hongroise » et « Estomac d’ivrogne ». Les élans de M. MacDonald semblent avoir contaminé bon nombre de jeunes artistes talentueux qui semblent croire que la vulgarité des couleurs et des coups de pinceaux peut être qualifiée élogieusement de « force » et d’« expression de soi ». […]