L’ouverture de la nouvelle bibliothèque, Université McGill, Montréal, comprenant les discours prononcés en cette occasion, une description du bâtiment et quelques notes au sujet de l’histoire de l’université; in Memoriam. Le 31 octobre 1893
M. Peter Redpath
Je prie Vos Excellences d’accepter mes remerciements les plus sincères d’honorer de votre présence cet événement dont j’ai eu le privilège d’être l’initiateur. Je remercie également Son Honneur le lieut.-gouverneur de la province de Québec ainsi que l’élégante assemblée qui se trouve devant et autour de moi, de l’intérêt qu’ils ont manifesté envers la cérémonie qui a lieu aujourd’hui. Un sentiment de satisfaction accompagne toujours le simple fait de poser un geste qui, selon son auteur, aura des répercussions positives sur l’université, la ville, et possiblement au-delà. Mais il est également agréable de recevoir l’approbation et la sympathie de ceux qui portent un intérêt à l’objectif poursuivi.[…]
L’allocution que l’on s’attend maintenant à ce que je prononce portera entièrement sur quelques aspects du bâtiment dans lequel nous nous trouvons réunis. Depuis des années, la nécessité d’obtenir des locaux significativement plus vastes pour la bibliothèque de l’Université McGill se faisait sentir. J’estime que ce bâtiment, auquel s’ajouteront d’éventuelles annexes, fournira l’espace nécessaire pour accueillir tous les ouvrages que l’université est susceptible d’acquérir au cours de nombreuses années à venir. La bibliothèque est à l’image de tout le soin et de toute l’attention que les architectes et moi-même lui avons consacrés. Les plans de plusieurs autres bibliothèques ont été examinés, et de nombreux bâtiments de ce type ont été visités, tant par moi-même que par l’architecte, dans le but d’établir ce qui serait le meilleur plan possible pour cet édifice-ci. Le bibliothécaire, nouvellement nommé, nous a également soumis quantité de suggestions au sujet de certains détails. Je suis conscient que nous n’avons pas atteint la perfection, mais le passage du temps révélera à quelle distance de cet idéal il nous avait été donné de parvenir. Quoique la fonctionnalité n’ait en aucun cas été sacrifiée au profit de considérations architecturales ou esthétiques, je crois que l’architecture et l’esthétisme de cette bâtisse ont satisfait les attentes des rares personnes ayant antérieurement eu la chance d’approfondir/d’étudier ces matières. Je me rappelle une réunion de l’assemblée, il y a de nombreuses années, durant laquelle le principal Dawson, qui demandait de façon générale de l’aide pour l’université, avait décrit les rayons de la bibliothèque comme « affamés de livres ». Les rayons, alors béants, ont été rassasiés, puis les ouvrages ont commencé à déborder. Mais ici, les rayons les accommoderont tous et de nouveaux rayons béeront de plus belle. Permettez-moi de prendre la liberté de dire à ceux qui pourraient désirer donner à l’université des collections d’ouvrages, qu’ils ne devraient pas diminuer la valeur de leur don en exigeant que les ouvrages en question soient conservés ensemble en tant que collections spéciales. Le bibliothécaire devrait ou plutôt, doit, disposer de la liberté de classifier à sa guise tous les livres sous sa juridiction et de ranger ensemble ceux qui traitent des mêmes sujets, quelle que soit leur provenance. Autrement, une certaine confusion, ainsi que des dépenses supplémentaires seront engendrées, et il est possible que le donateur en retire une certaine déception. Les seules composantes du bâtiment auxquelles je ferai une allusion particulière sont les fenêtres peintes situées à l’extrémité du hall. Elles sont un don de mon épouse, qui m’a chaleureusement soutenu durant l’entièreté des travaux. J’ai le grand plaisir de l’en remercier ici, et d’exprimer ma reconnaissance envers MM. Clayton et Bell, de Londres, les concepteurs, qui ont manifesté le plaisir sincère qu’ils ont éprouvé à exécuter ce travail. Ils étaient ouverts aux suggestions, et mon expérience passée de leurs réalisations m’avait convaincu de ne pas douter de leur minutie savante et de leur goût artistique. J’espère que les résultats, même s’il ne leur a pas été donné de consulter quelque Raphael, seront jugés satisfaisants. La décoration n’est pas encore terminée. Les fenêtres se verront en quelques endroits décorées d’inscriptions. […]. M. le président, je n’ai pas de contrat de donation à offrir aujourd’hui. Je sais ce qui se passe lorsqu’un homme érige en toute conscience un bâtiment sur des terres appartenant à un autre. Ce bâtiment appartient déjà à l’université sans que j’aie à lui en faire don. Je suis conscient qu’il ne constitue qu’un refuge pour le contenu, plus précieux, qu’il abritera; mis les étudiants, je l’espère, sauront apprécier les installations offertes ici, ainsi que ses alentours agréables, que je me suis employé à leur fournir.