La souveraineté en Arctique : une analyse des litiges territoriaux et des considérations de politique environnementale (2009)
A. Les revendications du Canada à l’égard de l’Arctique
Le Canada est le deuxième plus grand pays circumpolaire. Le vaste littoral du nord canadien et plusieurs des îles de l’océan arctique bordant ce littoral sont sans équivoque des territoires canadiens. Cependant, rien d’autre ne se définit aussi clairement en ce qui concerne le territoire arctique canadien – à commencer par son point de départ, les lignes de base. Plutôt que de tracer des lignes de base normales déterminées par le niveau de basse mer, le Canada a tracé des lignes de base droites autour de l’archipel Arctique. Ainsi, le Canada soutient que les détroits entre ces îles, une route primordiale le long du passage du Nord-Ouest, sont des eaux intérieures et ne sont pas assujettis au droit de passage inoffensif. Cette assertion, qui emprisonne de fait le passage du Nord-Ouest dans les eaux intérieures canadiennes et qui donne au Canada le droit d’exclure des navires étrangers ou de leur faire payer des droits de passage, est un des quatre grands conflits sur la souveraineté canadienne en Arctique.
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B. Les revendications de la Russie à l’égard de l’Arctique
Prenant les devants le 20 décembre 2001, la Russie a été la première nation à faire une demande d’extension de son plateau continental. La communauté internationale a condamné cette revendication audacieuse qui réclamait près de la moitié de l’océan arctique. La proposition de la Russie incluait 1,2 million de kilomètres carrés de territoire arctique passant par le pôle Nord ainsi que les dorsales de Lomonosov et d’Alpha-Mendeleïev, des zones potentiellement riches en pétrole et en gaz. Cette extension équivaut à la superficie du Texas, de la Californie et de l’Indiana. Cependant le Canada, le Danemark, les États-Unis et la Norvège pourraient également revendiquer des parties de cette région. Chacune des quatre autres puissances arctiques a émis une réponse officielle à la Commission au sujet de la proposition de la Russie. Le Canada et le Danemark ont émis un commentaire laconique à l’effet qu’ils avaient besoin de plus de renseignements pour émettre une recommandation sur le tracé du plateau continental russe tout en prenant soin de rappeler à la Commission que, dans le cadre de la Convention sur le droit de la mer, ses recommandations doivent être émises sans préjudice aux droits des pays limitrophes.
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C. Les revendications de la Norvège à l’égard de l’Arctique
Le 27 novembre 2006, la Norvège est devenue la seconde et seule autre nation arctique, avec la Russie, à faire une demande d’extension du plateau continental à la Commission. La demande de la Norvège étendait son plateau continental de 250 000 kilomètres carrés, incluant une zone se situant sous la mer de Norvège, appelée Banana Hole, et une zone sous la mer de Berents, appelée Loop Hole.
La Commission n’a toujours pas émis de recommandation sur la proposition norvégienne. Il est incertain si la décision de la Commission apportera une conclusion à la zone de conflit entre la Norvège et la Russie ou si cette décision ne fera que jeter de l’huile sur le feu.
D. Les revendications du Danemark à l’égard de l’Arctique
Géographiquement, le royaume du Danemark n’est pas situé en Arctique. Cependant, à cause de son territoire du Groenland et des îles Féroé qui sont des provinces danoises, le Danemark pourrait avoir de grandes revendications sur l’Arctique. En fait, les Danois affirment que leur territoire arctique pourrait s’étendre du Groenland jusqu’au pôle Nord en passant par la dorsale de Lomonosov qui est potentiellement riche en pétrole et en gaz. Le Danemark a jusqu’en novembre 2014 pour faire une proposition à la Commission.
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E. L’absence de revendications des États-Unis d’Amérique à l’égard de l’Arctique
Les États-Unis d’Amérique n’ont fait aucune demande d’extension du plateau continental, car, étant la seule nation industrialisée n’ayant pas ratifié la Convention sur le droit de la mer, elle n’en a pas le droit. Lorsque la Convention a atteint l’étape de la signature en 1982, plusieurs nations industrialisées s’étaient montrées réticentes à l’adopter, s’opposant principalement aux dispositions sur l’exploitation des grands fonds marins. Cependant, dès 1994, l’Entente mettant en œuvre la section XI et ses annexes était adoptée et l’administration du président William J. Clinton avait alors affirmé que cela rectifiait la situation. L’administration Clinton avait annoncé que les États-Unis signeraient le traité et l’avait envoyé au Sénat américain pour recevoir son avis et son consentement. Le Sénat n’a pas recommandé sa ratification et, plus de dix ans plus tard, le traité n’est toujours pas ratifié malgré la demande du président George W. Bush conseillant vivement au Sénat « d’agir favorablement concernant l’adhésion des É.-U. à la Convention [des Nations unies sur le droit de la mer]. »