LA TRAGÉDIE DE BIDDULPH.
Le récent massacre de la famille Donnelly, dans le canton de Biddulph, perpétré par une foule armée, est un crime qui n’a pas d’égal dans l’histoire du Canada. Peu importe sous quel angle on l’observe, on ne trouve aucune excuse à cet acte et, quelles que soient les victimes, la loi doit affirmer et exercer son autorité. Les Donnelly étaient peut-être de nature vindicative; il se peut qu’ils aient parfois maintenu les gens de leur entourage immédiat dans un état de terreur, en raison de leur comportement de hors-la-loi, mais cela ne justifie en rien ce cruel assassinat. Le Comité de vigilance a évidemment été formé afin d’assurer une protection mutuelle et cela aurait réussi si les membres n’avaient jamais outrepassé leur objectif légitime; mais en se faisant justice eux-mêmes et en massacrant les Donnelly de sang-froid, pour punir des offenses réelles, ou sans doute forgées, ils sont devenus les auteurs d’un tort bien pire encore que ceux contre qui ils ont dépensé leurs énergies mal dirigées et se sont retrouvés devant le tribunal pour répondre à des accusations de meurtre au premier degré. Autant que l’on sache, il semble que les Donnelly aient fini par être considérés par leurs voisins comme une famille d’ismaélites, et que, comme il fallait s’y attendre, ils aient souvent agi en conséquence. De très nombreux fermiers et leurs fils, vivant à proximité du lieu de la tragédie, ont été mis en détention dans l’attente de leur procès pour avoir eu connaissance du massacre, ou pour y avoir participé, mais on ne sait pas encore si la nature et la valeur des témoignages permettra de reconnaître coupables certains d’entre eux. Entre-temps, toutes les dispositions possibles seront prises pour traduire les meurtriers en justice. Espérons qu’ils feront exemple, pour qu’à l’avenir le sol canadien ne soit plus sali par des actes aussi crapuleux.