Documents de Cour :
Depuis plusieurs années maintenant, les historiens ont découvert la richesse de ce qu’on appelle couramment « les archives judiciaires » et s’intéressent de plus en plus aux traces documentaires laissées par l’appareil étatique de la régulation sociale et de la justice criminelle d’une époque révolue comme le XIXe et XXe siècles. Les documents de Cour sont de nature hétérogène: on retrouve des dépositions, des jugements, des mandats d’arrestation, de la correspondance et des déclarations de tous les genres. Dans le cas des documents de Cour que nous avons regroupés sur ce site Web, ce sont en fait aussi des documents gouvernementaux, car le Comté de Queen’s du Nouveau-Brunswick est gouverné par Grand Jury à l'époque. En effet, le Palais de Justice de Gagetown reçoit à la fois les causes criminelles et les réunions administratives, les deux devant jury! Comme les frais des soins qui ont été administrés à Gamby ont été défrayés par le Comté et la Province, les demandes de remboursement ont laissé des traces administratives dans les archives.
La complexité d’un appareil mixte comme celui-ci, judiciaire et gouvernemental à la fois, entraîne un fouillis considérable dans les archives. Les historiens utilisant les archives de Cour sont confrontés à la nature incomplète et déroutante des archives judiciaires. La plupart de ces documents ont été écrits à la main, mais certains ont été dactylographiés à mesure que la technologie devenait accessible. Plusieurs sont très difficiles à lire, parce que l’écriture est souvent peu soignée ou que la qualité des documents s’est dégradée avec le temps. De plus, certaines bibliothèques et centres d’archives ont regroupé, catalogué et microfilmé les documents pertinents, comme l’ont fait les Archives provinciales du Nouveau-Brunswick en séparant les causes criminelles des sessions d’administration du Comté de Queen’s. Bien que cela facilite leur travail, les historiens doivent être conscients que la création d’une pareille collection implique un certain degré d’interprétation lors de la sélection des documents, de leur classification et de leur organisation.
Même si les documents judiciaires sont produits par des instances gouvernementales, des avocats ou des juges respectés, la critique de ces sources doit ne peut être évitée. Leurs auteurs ont pu faire des erreurs ou mentir comme quiconque. Par exemple, les versions officielles des minutes de la Cour sont généralement mieux écrites, mais pas toujours aussi complètes que les brouillons de ces mêmes minutes. De plus, certaines décisions controversées ont pu disparaître des rapports officiels, comme la décision des payeurs de taxes de Chipman de se débarrasser du Frozen Man qui est disparu des documents de Cour. Les chercheurs ne doivent pas oublier que les juges et jurés, par exemple, ne laissaient pas leurs propres opinions et partis pris à l’extérieur de la salle d’audience et que leurs notes n’étaient pas toujours objectives.