Au Québec dans les années 1920, comme de nos jours, une enquête du coroner a lieu quand une mort violente ou autrement suspecte survient. La procédure à l’époque est relativement simple: le coroner mandaté par la couronne organise son enquête, qui doit être tenue dans la municipalité où est survenu le décès. Comme salle d’audience, il peut choisir une maison privée, une église, une école… L’espace doit être assez grand pour recevoir les témoins, les membres du jury, le corps de la victime, etc.
L’enquête sur le corps d’Aurore Gagnon a lieu à l’église de Sainte-Philomène de Fortierville. Le coroner récolte les témoignages y compris celui du médecin ayant effectué l’autopsie. Le rapport de ce dernier est un élément essentiel du dossier. Des procédures particulières doivent êtres suivies. Le jury doit prêter serment et on doit créer et conserver une copie écrite des preuves, des témoignages et du verdict. Dans son ensemble, l’enquête sert à déterminer si la cause de la mort est naturelle, non-naturelle ou criminelle.
Les enquêtes du coroner fournissent une documentation relativement abondante sur plusieurs types de morts violentes, y compris les accidents, les suicides et, bien sûr, les meurtres. Normalement, tous les documents produits dans le cadre de ces enquêtes sont regroupés dans des dossiers et conservés aux dépôts régionaux respectifs des Archives Nationales du Québec, dans un fonds distinct, celui des «Dossiers du coroner». L’historien André Lachance en a fait une utilisation quasi-exhaustive pour le District de Saint-François, dans les Cantons de l’Est, pour la période allant de 1900 à 1950, dans son ouvrage «La vie est si fragile…» Étude sur la mort violente dans les Cantons de l’Est, 1900-1950. Sherbrooke, éd. GGC, 2002, 209 p.
C’est le coroner lui-même qui rédige les documents suite à l’interrogation des témoins, souvent sur des formulaires préparés à cet effet. On doit donc lire les témoignages en ayant à l’esprit le fait qu’ils ont été transcrits sur le vif par un officier de la couronne, ce qui peut introduire des erreurs. Dans le cas d’une mort soupçonnée de nature criminelle, comme celle d’Aurore Gagnon, l’enquête du coroner est d’ailleurs le point de départ des procédures judiciaires visant à identifier et à punir le ou les coupable(s). Les documents produits lors de l’enquête pourront servir ultérieurement, soit à l’enquête préliminaire, soit au procès. Comme la cause dont il est question ici s'est effectivement rendue devant la cour, certains documents relatifs à l’enquête du coroner se sont retrouvés dans les dossiers des Sessions de la paix et de la Cour du banc du Roi.